Concours de nouvelles : rêve et onirisme =>gagnant=Ramosé
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Concours de nouvelles : rêve et onirisme =>gagnant=Ramosé
Nouveau concours de nouvelles dont le thème nous vient d'une fourmi
Le thème : Rêve et onirisme
Règles :
- vous avez jusqu'au 6 mai pour déposer vos nouvelles
- le vote durera 15 jours
- le langage sms est totalement proscrit
- la nouvelle ne doit pas excéder 4 pages sous word, police 12 en time new roman.
- le langage doit être correct
- chaque auteur ne peut poster qu'une seule nouvelle
Bonne chance à tous
Le thème : Rêve et onirisme
Règles :
- vous avez jusqu'au 6 mai pour déposer vos nouvelles
- le vote durera 15 jours
- le langage sms est totalement proscrit
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Modifié en dernier par diamant le jeu. mars 13, 2008 6:55 pm, modifié 6 fois.
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- Soldate farouche
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- Localisation : Derrière l'écran voyons !
Les Inachevés
La main droite d’Ethan saisit un crayon de bois. L’autre, reliée à un bras traversé par un tuyau transparent était de toute façon beaucoup trop faible pour faire quoi que ce soit. Ses yeux noisettes bleutés de cerne fixaient la page blanche du cahier. Soudain, un tremblement parcourut le corps malingre du jeune homme. Une première nausée l’assaillit. Le médicament navigant dans la perfusion commençait à faire son effet, effet d’ailleurs très désagréable. Ethan grimaça une poignée de seconde, raffermit sa prise sur le crayon et posa la mine grise sur la première ligne de la page.
Je viens d’apprendre dans la même journée que mon manuscrit a été refusé une fois de plus et cela malgré mes nombreuses corrections. Sur le chemin du retour une douleur affreuse m’a alors transpercé le crâne, une tumeur dont j’ignorais tout de l’existence s’est réveillée. Après mon opération, ma logeuse est venue me rendre visite, pour m’annoncer que suite à mes six mois de loyer non payé, j’étais viré du studio. Voilà et comme la journée n’était pas tout à fait finie, j’ai décidé d’en finir de peur d’apprendre une autre mauvaise nouvelle. Malheureusement ma chute volontaire du lit d’hôpital a rameuté une infirmière incroyablement balèze, qui m’a remis au lit et administré un calmant. Les effets se sont dissipés mais la douleur au bras gauche m’a fait changé d’avis.
Ethan lâcha son crayon et passa sa main valide sur son front humide de sueur. La fenêtre de sa chambre ouverte sur un ciel bleu indigo, laissa passer un papillon noir et jaune. Le fragile insecte, voleta au plafond, réalisant loopings sur galipettes aériennes. Le ballet du papillon hypnotisa Ethan, lui faisant oublier son état vaseux. Cependant l’ampoule blanchâtre qui éclairait la pièce capta l’attention du danseur ailé, qui en voulant s’en approcher y laissa plus que ses antennes. Un petit « oh ! » échappa au jeune homme.
Un papillon noir et jaune vient de se consumer d’amour ou de curiosité pour l’ampoule du plafond. Son cadavre gît au pied de mon lit. On raconte qu’un papillon qui meurt est un esprit qui vient d’être pardonné. Un esprit, mais celui de qui ? Pardonné, mais de quoi. Lors de cette mort mystérieuse, j’étais le seul dans la chambre et le couloir était étrangement silencieux. Un pardon a-t-il été accordé à mon esprit ? Si oui, mais de quoi ai-je été pardonné ? Les yeux d’Ethan se fermèrent un cours instant, savourant le silence qui l’entourait. Le malade se tortilla maladroitement afin de glisser sous les draps rêches qui bordaient son lit aux barres métalliques. Son souffle se fit plus long et une douce torpeur l’enveloppa. Le sommeil l’envahit et il y sombra avec délice.
J’ai fait un rêve. Le genre de rêve que les gens de tous les jours trouvent stupides mais qui font frémir les artistes. Ca tombe bien, les rêves pour artistes sont rares et en général je dois me contenter de faire des rêves banals. Ma boîte crânienne a été ouverte puis refermée il y a exactement vingt-huit heures. De peur que ce vagabondage onirique s’échappe de ma caboche je vais le coucher sur papier. Là, il perdra sûrement de son charme mais au moins, ne sera pas égaré dans les méandres de ma matière grise.
Le jeune homme cessa d’écrire et se massa longuement les mains. Le verre de jus d’orange que l’infirmière lui avait apporté lui fit soudain envie. Il l’avala sans prendre le temps de savourer le goût acidulé de l’agrume et son parfum sucré. Son verre posé, sa main reprit sa danse sur la piste blanche de papier.
Je marchais sur une plaine brumeuse, seuls quelques papillons noirs et jaunes m’accompagnaient en tournant autour de ma tête. L’air avait une douce odeur de talc pour bébé et le silence des lieux était plus que pesant. Un moment, un brouillard londonien m’enveloppa et me transporta dans une salle d’attente d’un cabinet médical. Je me suis alors installé près d’une fenêtre ouverte et j’ai attendu mon tour. Les autres patients semblaient bien plus mal en point que moi. Une femme au teint d’albâtre chantonnait doucement. Une partie de son buste droit et de son épaule gauche étaient horriblement déformé. Cela ne la gênait pas car entre deux chansons elle répétait inlassablement « Je suis inachevée ». Un enfant vêtu comme le Gavroche de Victor Hugo, avait la moitié du visage « mélangé ». Son œil et son nez se mêlaient dans des teints jaunâtres barbouillés. Lui non plus ne cessait de rabâcher qu’il était inachevé. Sur la table de la secrétaire, il y avait trois gros bocaux transparents. Le genre que les ménagères d’antan utilisaient pour les conserves, sauf que dans ce rêve ils contenaient chacun un fœtus à un stade plus ou moins avancé.
Ethan leva les yeux un court instant comme pour mieux rentrer en lui. Les sensations de son rêve lui revinrent et il reprit son crayon.
Peut-être ai-je pissé de peur car au matin, mes draps étaient humides. A moins que ce ne soit de la transpiration. Les fœtus parlaient aussi, du moins avec leur semblant de bouche, ils formaient des petites bulles qui en se collant à la paroi du bocal écrivaient « Je suis inachevé ». A ce moment là, je me suis réveillé. Peut-être que je n’étais pas prêt pour la suite de ce rêve.
Jusqu’à la fin de la journée, Ethan ne toucha plus au cahier. Il essayait de résoudre depuis son lit les problèmes qui l’attendaient à sa sortie de l’hôpital. Au sujet de son éditeur, il lui suffira juste de le rappeler et de le mettre au courant de sa situation. Il logera temporairement dans un centre pour S.D.F et payera ses frais d’hospitalisations avec son prochain salaire. Un sourire timide étira ses lèvres desséchées. Malgré tout ce qui lui était tombé dessus, il s’en sortira presque indemne. Le soir, il mangea de bon appétit la purée-poulet que lui avait servie une infirmière. Il voulait prendre des forces pour poursuivre son voyage de nuit.
Cette nuit, j’ai eu peur de perdre mon rêve. Même s’il m’a effrayé, cela m’aurait brisé le cœur de ne pas pouvoir le continuer. Je dois avouer que ma curiosité est plus que titillée. De retour dans la salle d’attente, d’autres patients s’y trouvaient déjà. La femme, le jeune enfant et les bocaux à fœtus par contre, n’étaient plus là. Un homme d’une maigreur incroyable se tenait debout près de la porte. Peut être un africain car sa peau d’un noir d’ébène n’était sûrement pas celle d’un hollandais. Son torse finement musclé et recouvert de colliers aux perles irrégulières et bariolées, était posé sur un tronc de bois. Non, son buste était prolongé par un tronc de bois. Le centaure végétal psalmodiait des mots dont le sens m’était inconnu mais d’une sonorité exquise. Machinalement je commençais à répéter ses mots quand une voix aussi douce que la soie mais aussi plaintive qu’une fermeture éclair coincée s’adressa à moi. « Vous aussi vous êtes inachevé ? Ne croyez pas être le seul. » Ces mystérieux propos venaient d’un sari. Un magnifique sari indien couleur flamme qui était hélas à moitié tissé. « Je suis comme vous ». Mon sang-froid légendaire ne fit qu’un tour et afin d’éviter de supporter tant d’émotions, je m’évanouis tout simplement.
Un long rire secoua Ethan. Le genre de rire qui arrivait sans prévenir ou presque et qui vous laissait ensuite à moitié mort de fatigue. A tâtons il saisit la sonnette électrique et appuya longuement dessus. Une infirmière arriva peu de temps après et lui demanda ce qu’il voulait. « De l’eau. Beaucoup d’eau s’il vous plait. » La jeune femme posa une main fraîche sur le front d’Ethan, lui sourit et sortit de la chambre. Elle revint avec un plateau métallique, chargé d’une carafe d’eau et un verre. Elle lui remplit un verre, le lui tendit et quitta la chambre. Contrairement au jus d’orange du matin, Ethan savoura l’eau fraîche et transparente qui lui glissait dans la gorge. Il imaginait son long parcours, cascadant sur les roches déchirées par les siècles, stagnant dans les lacs scintillant au soleil et gouttant doucement aux stalactites qui ornaient les grottes souterraines. Un si long voyage et finir dans la gorge d’un malade. Brusquement, sa température augmenta. Des spasmes secouèrent son corps et le verre qu’il tenait se brisa sur le carrelage. Un médecin qui traversait le couloir, l’aperçut et s’occupa de lui. Il lui planta une aiguille dans le bras et les tremblements s’espacèrent puis cessèrent. Après avoir examiné Ethan, il sortit de la chambre. Un détail le troublait. Dans sa crise le jeune homme ne cessait de dire « j’ai brisé son voyage, j’ai brisé son voyage… »
Hier, j’ai du faire une crise. Je me rappelle avoir bu de l’eau puis une tristesse immense m’a submergé. Je ne me souviens plus de la suite, mais ce matin j’ai remarqué un pansement dans le creux de mon bras gauche. Une piqûre, sûrement pour me soigner. Je ne pense pas avoir rêvé lors de cette crise, mais une Voix me parlait dans ma tête. Je ne crois pas que ce soit le médecin ou une infirmière, car cette voix était unique. C’est peut-être idiot mais on aurait dit la Voix de mon âme… Enfin, de ce qui me sert d’âme.
Ethan mâchonna consciencieusement le bout de son crayon. Ses cernes s’étaient estompées et son visage avait perdu sa teinte maladive. Soudain, il pressa la sonnette électrique et demanda à l’infirmière s’il lui était possible de voir sa tumeur. Surprise, elle répondit que c’était possible mais que peut de personne demandait à voir leur tumeur une fois extraite.
Je viens de faire connaissance avec un partie malade de moi. Ma tumeur flotte paisiblement dans un bocal rempli d’un liquide jaunâtre. On dirait un cailloux un peu rose et gris, de la taille d’une noisette. C’est donc ça qui m’a fait rater mon rendez-vous avec mon éditeur ? Une si petite chose qui dormait dans un coin de ma tête. Quand l’infirmière me l'a apporté, j’ai eu envie de le jeter par la fenêtre, mais un papillon est entré. Le jumeau de celui qui est mort avant-hier peut-être, car il lui ressemble énormément. A ma grande surprise, il s’est posé sur le bocal pendant quelques secondes, puis il est reparti. Je dois avouer que ça m’a fait peur sur le coup. Mais par la suite, la Voix-de-ce-qui-me-sert-d’âme m’a parlé ! Je me suis dit que je devenais fou, alors m’a rassuré. Elle m’a dit que j’étais un artiste très précieux pour le monde et la tumeur qui m’a envoyé ici était un messager de mon « moi ». Ce messager avait pour mission de me faire accéder aux rêves d’artistes et que ces rêves avaient besoin d’exister et non plus d’être imaginé. Ensuite la Voix s’est tût. Demain, je sort de l’hôpital.
Trois cents soixante cinq jours plus tard, Ethan ouvrit sa galerie d’art Les Inachevés. Les visiteurs entraient septiques et en ressortaient émerveillés. « Il y a là quelque chose de magique ! Ces œuvres inachevés et leur version achevée juste à côté, c’est comme dans un rêve ! ». Sous une lumière bleue, une femme en marbre, les bras tendues vers le ciel semblait boire la lumière qui la baignait. Ses lèvres entrouvertes et ses yeux plissés donnent une sorte d’humanité à sa chair minérale. A sa gauche, la même statue, la même pose, mais l’épaule gauche de la madone de marbre et un côté de son buste droit manquaient, inachevés. Sur un mur, toile représentant un petit garçon, sûrement le frère cadet du célèbre Gavroche. Ses yeux bleus pétillaient de malice et un sourire mutin étirait ses lèvres rosées. A la gauche du tableau, son jumeau au visage barbouillé par un pinceau maladroit. Son nez pointu et ses yeux malicieux forment une tâche jaune sale qui jure sublimement avec le reste de son visage aux teintes parfaites. La galerie est à l’image de son artiste, rêveur, fragile et magnifique. De temps en temps, Ethan y emmène ses trois filles, qui malgré leur jeune âge appréciaient les œuvres de leur papa.
Je pense avoir réussi dans ma voie d’artiste. Cependant ma mission reste inachevée. Tant que des inachevés erreront dans mes rêves, jamais je ne cesserais de produire ces œuvres. Mes filles prendront peut-être le relais lors que le poids des âges se fera trop lourd pour moi. Peut-être que vous aussi vous pourriez nous aider. Il suffit de commencer, mais avec maladresse, mais de commencer tout simplement. M’aideriez-vous ?
FIN
Ando
La main droite d’Ethan saisit un crayon de bois. L’autre, reliée à un bras traversé par un tuyau transparent était de toute façon beaucoup trop faible pour faire quoi que ce soit. Ses yeux noisettes bleutés de cerne fixaient la page blanche du cahier. Soudain, un tremblement parcourut le corps malingre du jeune homme. Une première nausée l’assaillit. Le médicament navigant dans la perfusion commençait à faire son effet, effet d’ailleurs très désagréable. Ethan grimaça une poignée de seconde, raffermit sa prise sur le crayon et posa la mine grise sur la première ligne de la page.
Je viens d’apprendre dans la même journée que mon manuscrit a été refusé une fois de plus et cela malgré mes nombreuses corrections. Sur le chemin du retour une douleur affreuse m’a alors transpercé le crâne, une tumeur dont j’ignorais tout de l’existence s’est réveillée. Après mon opération, ma logeuse est venue me rendre visite, pour m’annoncer que suite à mes six mois de loyer non payé, j’étais viré du studio. Voilà et comme la journée n’était pas tout à fait finie, j’ai décidé d’en finir de peur d’apprendre une autre mauvaise nouvelle. Malheureusement ma chute volontaire du lit d’hôpital a rameuté une infirmière incroyablement balèze, qui m’a remis au lit et administré un calmant. Les effets se sont dissipés mais la douleur au bras gauche m’a fait changé d’avis.
Ethan lâcha son crayon et passa sa main valide sur son front humide de sueur. La fenêtre de sa chambre ouverte sur un ciel bleu indigo, laissa passer un papillon noir et jaune. Le fragile insecte, voleta au plafond, réalisant loopings sur galipettes aériennes. Le ballet du papillon hypnotisa Ethan, lui faisant oublier son état vaseux. Cependant l’ampoule blanchâtre qui éclairait la pièce capta l’attention du danseur ailé, qui en voulant s’en approcher y laissa plus que ses antennes. Un petit « oh ! » échappa au jeune homme.
Un papillon noir et jaune vient de se consumer d’amour ou de curiosité pour l’ampoule du plafond. Son cadavre gît au pied de mon lit. On raconte qu’un papillon qui meurt est un esprit qui vient d’être pardonné. Un esprit, mais celui de qui ? Pardonné, mais de quoi. Lors de cette mort mystérieuse, j’étais le seul dans la chambre et le couloir était étrangement silencieux. Un pardon a-t-il été accordé à mon esprit ? Si oui, mais de quoi ai-je été pardonné ? Les yeux d’Ethan se fermèrent un cours instant, savourant le silence qui l’entourait. Le malade se tortilla maladroitement afin de glisser sous les draps rêches qui bordaient son lit aux barres métalliques. Son souffle se fit plus long et une douce torpeur l’enveloppa. Le sommeil l’envahit et il y sombra avec délice.
J’ai fait un rêve. Le genre de rêve que les gens de tous les jours trouvent stupides mais qui font frémir les artistes. Ca tombe bien, les rêves pour artistes sont rares et en général je dois me contenter de faire des rêves banals. Ma boîte crânienne a été ouverte puis refermée il y a exactement vingt-huit heures. De peur que ce vagabondage onirique s’échappe de ma caboche je vais le coucher sur papier. Là, il perdra sûrement de son charme mais au moins, ne sera pas égaré dans les méandres de ma matière grise.
Le jeune homme cessa d’écrire et se massa longuement les mains. Le verre de jus d’orange que l’infirmière lui avait apporté lui fit soudain envie. Il l’avala sans prendre le temps de savourer le goût acidulé de l’agrume et son parfum sucré. Son verre posé, sa main reprit sa danse sur la piste blanche de papier.
Je marchais sur une plaine brumeuse, seuls quelques papillons noirs et jaunes m’accompagnaient en tournant autour de ma tête. L’air avait une douce odeur de talc pour bébé et le silence des lieux était plus que pesant. Un moment, un brouillard londonien m’enveloppa et me transporta dans une salle d’attente d’un cabinet médical. Je me suis alors installé près d’une fenêtre ouverte et j’ai attendu mon tour. Les autres patients semblaient bien plus mal en point que moi. Une femme au teint d’albâtre chantonnait doucement. Une partie de son buste droit et de son épaule gauche étaient horriblement déformé. Cela ne la gênait pas car entre deux chansons elle répétait inlassablement « Je suis inachevée ». Un enfant vêtu comme le Gavroche de Victor Hugo, avait la moitié du visage « mélangé ». Son œil et son nez se mêlaient dans des teints jaunâtres barbouillés. Lui non plus ne cessait de rabâcher qu’il était inachevé. Sur la table de la secrétaire, il y avait trois gros bocaux transparents. Le genre que les ménagères d’antan utilisaient pour les conserves, sauf que dans ce rêve ils contenaient chacun un fœtus à un stade plus ou moins avancé.
Ethan leva les yeux un court instant comme pour mieux rentrer en lui. Les sensations de son rêve lui revinrent et il reprit son crayon.
Peut-être ai-je pissé de peur car au matin, mes draps étaient humides. A moins que ce ne soit de la transpiration. Les fœtus parlaient aussi, du moins avec leur semblant de bouche, ils formaient des petites bulles qui en se collant à la paroi du bocal écrivaient « Je suis inachevé ». A ce moment là, je me suis réveillé. Peut-être que je n’étais pas prêt pour la suite de ce rêve.
Jusqu’à la fin de la journée, Ethan ne toucha plus au cahier. Il essayait de résoudre depuis son lit les problèmes qui l’attendaient à sa sortie de l’hôpital. Au sujet de son éditeur, il lui suffira juste de le rappeler et de le mettre au courant de sa situation. Il logera temporairement dans un centre pour S.D.F et payera ses frais d’hospitalisations avec son prochain salaire. Un sourire timide étira ses lèvres desséchées. Malgré tout ce qui lui était tombé dessus, il s’en sortira presque indemne. Le soir, il mangea de bon appétit la purée-poulet que lui avait servie une infirmière. Il voulait prendre des forces pour poursuivre son voyage de nuit.
Cette nuit, j’ai eu peur de perdre mon rêve. Même s’il m’a effrayé, cela m’aurait brisé le cœur de ne pas pouvoir le continuer. Je dois avouer que ma curiosité est plus que titillée. De retour dans la salle d’attente, d’autres patients s’y trouvaient déjà. La femme, le jeune enfant et les bocaux à fœtus par contre, n’étaient plus là. Un homme d’une maigreur incroyable se tenait debout près de la porte. Peut être un africain car sa peau d’un noir d’ébène n’était sûrement pas celle d’un hollandais. Son torse finement musclé et recouvert de colliers aux perles irrégulières et bariolées, était posé sur un tronc de bois. Non, son buste était prolongé par un tronc de bois. Le centaure végétal psalmodiait des mots dont le sens m’était inconnu mais d’une sonorité exquise. Machinalement je commençais à répéter ses mots quand une voix aussi douce que la soie mais aussi plaintive qu’une fermeture éclair coincée s’adressa à moi. « Vous aussi vous êtes inachevé ? Ne croyez pas être le seul. » Ces mystérieux propos venaient d’un sari. Un magnifique sari indien couleur flamme qui était hélas à moitié tissé. « Je suis comme vous ». Mon sang-froid légendaire ne fit qu’un tour et afin d’éviter de supporter tant d’émotions, je m’évanouis tout simplement.
Un long rire secoua Ethan. Le genre de rire qui arrivait sans prévenir ou presque et qui vous laissait ensuite à moitié mort de fatigue. A tâtons il saisit la sonnette électrique et appuya longuement dessus. Une infirmière arriva peu de temps après et lui demanda ce qu’il voulait. « De l’eau. Beaucoup d’eau s’il vous plait. » La jeune femme posa une main fraîche sur le front d’Ethan, lui sourit et sortit de la chambre. Elle revint avec un plateau métallique, chargé d’une carafe d’eau et un verre. Elle lui remplit un verre, le lui tendit et quitta la chambre. Contrairement au jus d’orange du matin, Ethan savoura l’eau fraîche et transparente qui lui glissait dans la gorge. Il imaginait son long parcours, cascadant sur les roches déchirées par les siècles, stagnant dans les lacs scintillant au soleil et gouttant doucement aux stalactites qui ornaient les grottes souterraines. Un si long voyage et finir dans la gorge d’un malade. Brusquement, sa température augmenta. Des spasmes secouèrent son corps et le verre qu’il tenait se brisa sur le carrelage. Un médecin qui traversait le couloir, l’aperçut et s’occupa de lui. Il lui planta une aiguille dans le bras et les tremblements s’espacèrent puis cessèrent. Après avoir examiné Ethan, il sortit de la chambre. Un détail le troublait. Dans sa crise le jeune homme ne cessait de dire « j’ai brisé son voyage, j’ai brisé son voyage… »
Hier, j’ai du faire une crise. Je me rappelle avoir bu de l’eau puis une tristesse immense m’a submergé. Je ne me souviens plus de la suite, mais ce matin j’ai remarqué un pansement dans le creux de mon bras gauche. Une piqûre, sûrement pour me soigner. Je ne pense pas avoir rêvé lors de cette crise, mais une Voix me parlait dans ma tête. Je ne crois pas que ce soit le médecin ou une infirmière, car cette voix était unique. C’est peut-être idiot mais on aurait dit la Voix de mon âme… Enfin, de ce qui me sert d’âme.
Ethan mâchonna consciencieusement le bout de son crayon. Ses cernes s’étaient estompées et son visage avait perdu sa teinte maladive. Soudain, il pressa la sonnette électrique et demanda à l’infirmière s’il lui était possible de voir sa tumeur. Surprise, elle répondit que c’était possible mais que peut de personne demandait à voir leur tumeur une fois extraite.
Je viens de faire connaissance avec un partie malade de moi. Ma tumeur flotte paisiblement dans un bocal rempli d’un liquide jaunâtre. On dirait un cailloux un peu rose et gris, de la taille d’une noisette. C’est donc ça qui m’a fait rater mon rendez-vous avec mon éditeur ? Une si petite chose qui dormait dans un coin de ma tête. Quand l’infirmière me l'a apporté, j’ai eu envie de le jeter par la fenêtre, mais un papillon est entré. Le jumeau de celui qui est mort avant-hier peut-être, car il lui ressemble énormément. A ma grande surprise, il s’est posé sur le bocal pendant quelques secondes, puis il est reparti. Je dois avouer que ça m’a fait peur sur le coup. Mais par la suite, la Voix-de-ce-qui-me-sert-d’âme m’a parlé ! Je me suis dit que je devenais fou, alors m’a rassuré. Elle m’a dit que j’étais un artiste très précieux pour le monde et la tumeur qui m’a envoyé ici était un messager de mon « moi ». Ce messager avait pour mission de me faire accéder aux rêves d’artistes et que ces rêves avaient besoin d’exister et non plus d’être imaginé. Ensuite la Voix s’est tût. Demain, je sort de l’hôpital.
Trois cents soixante cinq jours plus tard, Ethan ouvrit sa galerie d’art Les Inachevés. Les visiteurs entraient septiques et en ressortaient émerveillés. « Il y a là quelque chose de magique ! Ces œuvres inachevés et leur version achevée juste à côté, c’est comme dans un rêve ! ». Sous une lumière bleue, une femme en marbre, les bras tendues vers le ciel semblait boire la lumière qui la baignait. Ses lèvres entrouvertes et ses yeux plissés donnent une sorte d’humanité à sa chair minérale. A sa gauche, la même statue, la même pose, mais l’épaule gauche de la madone de marbre et un côté de son buste droit manquaient, inachevés. Sur un mur, toile représentant un petit garçon, sûrement le frère cadet du célèbre Gavroche. Ses yeux bleus pétillaient de malice et un sourire mutin étirait ses lèvres rosées. A la gauche du tableau, son jumeau au visage barbouillé par un pinceau maladroit. Son nez pointu et ses yeux malicieux forment une tâche jaune sale qui jure sublimement avec le reste de son visage aux teintes parfaites. La galerie est à l’image de son artiste, rêveur, fragile et magnifique. De temps en temps, Ethan y emmène ses trois filles, qui malgré leur jeune âge appréciaient les œuvres de leur papa.
Je pense avoir réussi dans ma voie d’artiste. Cependant ma mission reste inachevée. Tant que des inachevés erreront dans mes rêves, jamais je ne cesserais de produire ces œuvres. Mes filles prendront peut-être le relais lors que le poids des âges se fera trop lourd pour moi. Peut-être que vous aussi vous pourriez nous aider. Il suffit de commencer, mais avec maladresse, mais de commencer tout simplement. M’aideriez-vous ?
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Ando
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Bien qu'organisant le concours, je me permets d'y participer, et ce pour plusieurs raisons : le thème n'est pas de moi (puisqu'il ma été envoyé par une fourmi comme je l'avais demandé ICI ). Ensuite le vote est fait par les membres, et les administrateurs n'interviennent en rien dans les résultats. Et puis parce que le thème me plaisait ^^
Le rêve de Perle
Perle était comme beaucoup de petites filles, une enfant dont la vie était emplie de rêves. Elle rêvait d’une chose bien commune : le prince charmant !
Ne passait elle pas des heures devant le miroir, à s’entraîner à dire ces quelques mots : « oui, je le veux ! ».
Souvent en grandissant, les enfants perdent non pas leurs rêves, mais ils cessent plus ou moins d’y croire, ou plutôt cessent de croire à leur possible réalisation.
Perle quant à elle, plus les années passaient, et plus elle y croyait fort. Certes, il y avait des moments de désillusion, mais les moments où elle croyait en sa bonne étoile étaient bien plus forts !
Perle refusait d’écouter ce pessimisme ambiant face à l’amour. Ce pessimisme qui ne touchait auparavant que les femmes d’un certain âge, mais qui désormais parvenait aux oreilles des jeunes filles, leur laissant une image amère de la gente masculine. Alors même qu’elle n’avait aucune raison de le penser elles-mêmes, puisque n’ayant aucune expérience en ce sens, les jeunes filles craignaient les hommes. Les jeunes filles adoptaient des comportements méfiants, voire même hostiles à l’égard des hommes.
Peut-être avait-elle lu trop de contes de fée, peut-être était-elle trop rêveuse, mais bien que les années passaient Perle y croyait toujours plus fort !
Perle avait cru déceler chez un jeune garçon, toutes les qualités pour en faire son Prince charmant. Aussi en était-elle éperdument amoureuse ! Mais nourrie au lait du merveilleux, Perle avait des principes auxquels il lui était impossible de déroger, ainsi s’abstient-elle des années durant quelque pas que ce soit envers le jeune homme… Il arriva ce qu’il devait arrivé : leurs routes se séparèrent, alors même qu’elles n’avaient jamais été liées…
Cela n’empêcha pas, Perle d’y croire toujours plus fort. Elle pensait que le destin serait avec elle, et que par dieu sait quel miracle, man½uvre, malice, elle retrouverait celui qui éclairait tant son regard et son coeur !
Tardivement, Perle eut une vraie histoire, où elle essaya de transposer son rêve de petite fille… Elle n’avait pas eu son premier Prince, elle ne pouvait attribuer à cet homme qui était entré un peu par hasard dans sa vie, un autre rôle que celui de Prince !
Mais elle sentait bien qu’il n’avait pas tous les attributs du Prince ! Elle l’aimait, ça oui elle aimait ! Mais elle aimait ce qu’elle avait tant rêvé et que désormais elle transposait…
Perle connu durant quelques mois un amour passionné, un amour dans lequel elle s’investit de tout son c½ur, de toute son âme. Mais cet amour fut brisé ! Oh, pas par le supposé Prince ! Mais par de plus hautes instances…
Ce fut un déchirement pour Perle. Combien de larmes versa t’elle ? Jamais elle ne se sentit si désemparée, jamais elle n’avait connu pareille peine.
Elle cru que les choses allaient s’arranger prestement ! Mais ce ne fut point le cas, et alors qu’elle eut un espoir si fou, si souriant, celui-ci se brisa, et Perle s’enfonça dans la tristesse et la mélancolie.
Perle devait elle cesser de croire à son rêve ? Perle devait-elle se rallier à l’idée qu’elle avait tant réfutée ? Non, elle ne pouvait s’y résoudre !
Pendant longtemps, on cru que les saignées libéraient du mal, d’une certaine manière certains y croient encore, mais la meilleure façon de se libérer du mal si terrible que l’on peut ressentir n’est elle pas de laisser couler non le sang mais l’encre sur du papier ?
C’est ainsi, que dans les moments les plus insoutenables, Perle laissait la plume glisser. Sans réfléchir, elle laissait sa main vagabonder en toute liberté. Des mots se formaient, et cela l’aidait.
Un homme trouva ces mots formés, et tendit la main à Perle…
Perle accepta la main… Elle apprit à découvrir cet homme… Mais rapidement ce qu’elle pouvait savoir et partager ne lui suffisait plus ! Elle prit l’initiative de lui en demander plus ! L’homme répondit instantanément favorablement, il lui fallut tout de même quelques temps pour mettre en ½uvre ce qu’il avait dit… Mais ce n’en fut que plus beau, lorsqu’un matin il vint à Perle. Ce jour là, il ne tarda pas à lui en promettre davantage. Elle décida d’y croire, d’y croire plus que jamais.
Les choses commencèrent à s’enchaîner, et un matin Perle se réveilla avec une certitude : son rêve était réalisé, elle avait son Prince.
29/04/2007
Le rêve de Perle
Perle était comme beaucoup de petites filles, une enfant dont la vie était emplie de rêves. Elle rêvait d’une chose bien commune : le prince charmant !
Ne passait elle pas des heures devant le miroir, à s’entraîner à dire ces quelques mots : « oui, je le veux ! ».
Souvent en grandissant, les enfants perdent non pas leurs rêves, mais ils cessent plus ou moins d’y croire, ou plutôt cessent de croire à leur possible réalisation.
Perle quant à elle, plus les années passaient, et plus elle y croyait fort. Certes, il y avait des moments de désillusion, mais les moments où elle croyait en sa bonne étoile étaient bien plus forts !
Perle refusait d’écouter ce pessimisme ambiant face à l’amour. Ce pessimisme qui ne touchait auparavant que les femmes d’un certain âge, mais qui désormais parvenait aux oreilles des jeunes filles, leur laissant une image amère de la gente masculine. Alors même qu’elle n’avait aucune raison de le penser elles-mêmes, puisque n’ayant aucune expérience en ce sens, les jeunes filles craignaient les hommes. Les jeunes filles adoptaient des comportements méfiants, voire même hostiles à l’égard des hommes.
Peut-être avait-elle lu trop de contes de fée, peut-être était-elle trop rêveuse, mais bien que les années passaient Perle y croyait toujours plus fort !
Perle avait cru déceler chez un jeune garçon, toutes les qualités pour en faire son Prince charmant. Aussi en était-elle éperdument amoureuse ! Mais nourrie au lait du merveilleux, Perle avait des principes auxquels il lui était impossible de déroger, ainsi s’abstient-elle des années durant quelque pas que ce soit envers le jeune homme… Il arriva ce qu’il devait arrivé : leurs routes se séparèrent, alors même qu’elles n’avaient jamais été liées…
Cela n’empêcha pas, Perle d’y croire toujours plus fort. Elle pensait que le destin serait avec elle, et que par dieu sait quel miracle, man½uvre, malice, elle retrouverait celui qui éclairait tant son regard et son coeur !
Tardivement, Perle eut une vraie histoire, où elle essaya de transposer son rêve de petite fille… Elle n’avait pas eu son premier Prince, elle ne pouvait attribuer à cet homme qui était entré un peu par hasard dans sa vie, un autre rôle que celui de Prince !
Mais elle sentait bien qu’il n’avait pas tous les attributs du Prince ! Elle l’aimait, ça oui elle aimait ! Mais elle aimait ce qu’elle avait tant rêvé et que désormais elle transposait…
Perle connu durant quelques mois un amour passionné, un amour dans lequel elle s’investit de tout son c½ur, de toute son âme. Mais cet amour fut brisé ! Oh, pas par le supposé Prince ! Mais par de plus hautes instances…
Ce fut un déchirement pour Perle. Combien de larmes versa t’elle ? Jamais elle ne se sentit si désemparée, jamais elle n’avait connu pareille peine.
Elle cru que les choses allaient s’arranger prestement ! Mais ce ne fut point le cas, et alors qu’elle eut un espoir si fou, si souriant, celui-ci se brisa, et Perle s’enfonça dans la tristesse et la mélancolie.
Perle devait elle cesser de croire à son rêve ? Perle devait-elle se rallier à l’idée qu’elle avait tant réfutée ? Non, elle ne pouvait s’y résoudre !
Pendant longtemps, on cru que les saignées libéraient du mal, d’une certaine manière certains y croient encore, mais la meilleure façon de se libérer du mal si terrible que l’on peut ressentir n’est elle pas de laisser couler non le sang mais l’encre sur du papier ?
C’est ainsi, que dans les moments les plus insoutenables, Perle laissait la plume glisser. Sans réfléchir, elle laissait sa main vagabonder en toute liberté. Des mots se formaient, et cela l’aidait.
Un homme trouva ces mots formés, et tendit la main à Perle…
Perle accepta la main… Elle apprit à découvrir cet homme… Mais rapidement ce qu’elle pouvait savoir et partager ne lui suffisait plus ! Elle prit l’initiative de lui en demander plus ! L’homme répondit instantanément favorablement, il lui fallut tout de même quelques temps pour mettre en ½uvre ce qu’il avait dit… Mais ce n’en fut que plus beau, lorsqu’un matin il vint à Perle. Ce jour là, il ne tarda pas à lui en promettre davantage. Elle décida d’y croire, d’y croire plus que jamais.
Les choses commencèrent à s’enchaîner, et un matin Perle se réveilla avec une certitude : son rêve était réalisé, elle avait son Prince.
29/04/2007
Modifié en dernier par diamant le mer. mai 09, 2007 7:23 pm, modifié 1 fois.
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c'est mon bapteme du feu
Morphée te voilà enfin. Depuis de longues minutes mon corps immobile attend ta venue, symbole de délivrance, depuis de longues minutes mon esprit est aussi noir que le monde qui l’entoure et est torturé par ces démons qui chaque soir viennent lui rappeler que je souffre.
Doucement tu prends mon âme par la main pour la sortir de son carcan qu’est mon corps et tu l’emmenes vers un monde meilleur, un monde où rien n’est impossible, rien n’est prohibé, où je suis enfin maitre de mon destin…
Petit, je t’appellais Peter Pan, quelle drôle d’idée, et ensemble nous volions insouscients vers ce monde imaginaire, j’y revivais mes journées, le sourire aux lèvres, dans le bonheur et l’ignorance de l’enfance. Tout était beau, tout était calme, tu m’offrais les plus beaux jouets, ou tout du moins ceux que je désirais, j’étais, une nuit, super-heros aux pouvoirs surnaturels, une nuit, prince charmant à la quête d’une princesse endormie. Bien sûr parfois, nous devions affronter ce monstre hideux vu l’après-midi même dans ce dessin animé trop violent ou nous battre contre une armée de petits soldats de plombs commandés par monsieur Machu, directeur de l’école.
Mais j’ai grandi depuis et les monstres à trois têtes qui venaient nous déranger dans nos envolées ont pris forme humaine. Ils ont comme moi, un nez, deux yeux, une bouche, sans pouvoirs maléfiques et pourtant les créatures de ma jeunesse sont des anges par rapport à eux. Leurs armes sont les mots, affutés comme le vent, et quand l’un d’entre eux perce ma carapace, la nuit ne suffit pas à me guérir et je te quitte au matin encore blessé et souffrant. Ils connaissent mes peurs, mes angoisses et savent les retourner contre moi pour me torturer.
Heureusement certaines nuits, ils ne viennent pas, ils restent terrés dans leurs repères et alors soulagé je peux me ballader et aller voir un autre monde, celui de l’amour. Je peux parler avec les anges et surtout avec l’Ange, celui qui fait battre mon c½ur. Elle est là, assise, souriante et regarde, avec ces petits yeux pleins de malice, ce pays merveilleux. Je m’assois à ses côtés et nous parlons de nos vies qui ne sont plus communes. Un peu gêné tu t’éloignes de quelques pas, me tournes le dos, mais j’imagine que les rires et les mots que tu entends ne laissent aucun doute sur nos occupations. En réalité tu as toujours le même rôle, le même but, celui de m’offrir ce que je désire, la seul nuance est que le jouet n’est plus en plastique et que je dois désormais Bon reveil chers auditeurs il est sept heures, les infos avec Christophe David : Bonjour à tous, nouvel attentat sanglant hier soir à Bagdad, la voiture piégée qui…
Morphée ! attends, avant que tu ailles te coucher, dis moi, c’est ça le rêve américain… ?
Morphée te voilà enfin. Depuis de longues minutes mon corps immobile attend ta venue, symbole de délivrance, depuis de longues minutes mon esprit est aussi noir que le monde qui l’entoure et est torturé par ces démons qui chaque soir viennent lui rappeler que je souffre.
Doucement tu prends mon âme par la main pour la sortir de son carcan qu’est mon corps et tu l’emmenes vers un monde meilleur, un monde où rien n’est impossible, rien n’est prohibé, où je suis enfin maitre de mon destin…
Petit, je t’appellais Peter Pan, quelle drôle d’idée, et ensemble nous volions insouscients vers ce monde imaginaire, j’y revivais mes journées, le sourire aux lèvres, dans le bonheur et l’ignorance de l’enfance. Tout était beau, tout était calme, tu m’offrais les plus beaux jouets, ou tout du moins ceux que je désirais, j’étais, une nuit, super-heros aux pouvoirs surnaturels, une nuit, prince charmant à la quête d’une princesse endormie. Bien sûr parfois, nous devions affronter ce monstre hideux vu l’après-midi même dans ce dessin animé trop violent ou nous battre contre une armée de petits soldats de plombs commandés par monsieur Machu, directeur de l’école.
Mais j’ai grandi depuis et les monstres à trois têtes qui venaient nous déranger dans nos envolées ont pris forme humaine. Ils ont comme moi, un nez, deux yeux, une bouche, sans pouvoirs maléfiques et pourtant les créatures de ma jeunesse sont des anges par rapport à eux. Leurs armes sont les mots, affutés comme le vent, et quand l’un d’entre eux perce ma carapace, la nuit ne suffit pas à me guérir et je te quitte au matin encore blessé et souffrant. Ils connaissent mes peurs, mes angoisses et savent les retourner contre moi pour me torturer.
Heureusement certaines nuits, ils ne viennent pas, ils restent terrés dans leurs repères et alors soulagé je peux me ballader et aller voir un autre monde, celui de l’amour. Je peux parler avec les anges et surtout avec l’Ange, celui qui fait battre mon c½ur. Elle est là, assise, souriante et regarde, avec ces petits yeux pleins de malice, ce pays merveilleux. Je m’assois à ses côtés et nous parlons de nos vies qui ne sont plus communes. Un peu gêné tu t’éloignes de quelques pas, me tournes le dos, mais j’imagine que les rires et les mots que tu entends ne laissent aucun doute sur nos occupations. En réalité tu as toujours le même rôle, le même but, celui de m’offrir ce que je désire, la seul nuance est que le jouet n’est plus en plastique et que je dois désormais Bon reveil chers auditeurs il est sept heures, les infos avec Christophe David : Bonjour à tous, nouvel attentat sanglant hier soir à Bagdad, la voiture piégée qui…
Morphée ! attends, avant que tu ailles te coucher, dis moi, c’est ça le rêve américain… ?
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- Oeuf éclos
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- Enregistré le : jeu. août 31, 2006 10:00 am
- Localisation : Juste... Enfin... Pas loin.
Bonjour à tous !
Je suis un tantinet à la bourre et, je dois l'avouer, j'ai un peu dépassé le cadre des quatre pages.
C'est ma première nouvelle et j'espère que vous saurez être indulgents.
Ce récit fait partie d'un cycle, d'une saga que j'ai en tête depuis des années et que je compte écrire un jour si le temps me laisse le loisir de le faire.
Le Rêve y tient le rôle principal et donc j'ai pensé que cette histoire convenait tout à fait au thème de ce concours. Cependant il m'a fallut faire un gros travail d'adaptation afin d'en faire une nouvelle qui se suffit en elle-même. Malgré tout il resterait quelques explications à donner et quleques éclaircissement du fait de son retrait de tout un contexte qui est plutôt fourni...
Tant pis. J'aime tellement certains de ces personnages (Bracasse, la silhouette, Hervé...) que je ne pouvais pas les en retirer.
Allez, à votre jugement et peut-être à bientôt !
Réveille-toi, Bébé, c'est l'heure.
C'est souvent de nos meilleurs amis que viennent nos pires ennuis... - Bernard Werber (Les Thanatonautes)
Je croyais m’être réveillé en sursaut. Je n’y voyais pas grand-chose car seul un petit velux offrait quelque lumière dans la petite chambre.
Elle était là en face de moi. Une ombre parmi les ombres, mais plus sombre que toutes les ténèbres environnantes.
Elle s’est approchée de moi sans bruit, terrorisant même le silence sur son passage.
J’aurais voulu hurler, réveiller la jeune femme à mes côtés, mais j’étais incapable de tout mouvement et aucun son ne voulait sortir se confronter à cette effrayante silhouette.
Tout en elle était froid. Si froid que de la vapeur sortait de ma bouche au rythme de mon souffle qui s’accélérait.
L’ombre a glissé jusqu’au pied du lit. Son regard sans yeux s’est infiltré en moi l’instant d’une éternité.
La féminité de sa posture. La froideur de son apparence. L’intensité de son silence.
Puis elle s’est penchée sur moi et a agrippé ma main.
Alors, j’ai hurlé.
***
« Jacques ! C’est l’heure… »
Je pense qu’il est consciemment difficile de porter un jugement objectif sur soi-même. Comment se soulager d’une faute que l’on sait très bien avoir commise ? Comment supporter l’idée d’en être le seul coupable ? Paradoxalement, je suis certain que ce jugement se fait, à notre insu avec la plus grande rigueur. Mais est-ce bien le moment d’en débattre, Jacquot ?
Je n’ai jamais apprécié cette couleur verte qui tapisse les murs de ma chambre.
« Bébé ! Réveille-toi, c’est l’heure ».
Selon Titia, le vert aurait quelque vertu apaisante.
Je ne m’en sens pas plus calme pour autant. Moi, je préfère le blanc.
La nausée.
Je crois que j’ai une de ces envies de dégobiller ! J’ai aussi très mal au crâne. En même temps, j’ai une de ces gaules ! C’est la cuisse de Titia contre ma jambe, là !
« Jacques ! Debout ».
C’est dur d’ouvrir les yeux alors qu’on n’en a absolument aucune envie. Pourquoi le ferai-je ?
J’ai envie de pisser.
Je n’ai qu’à y aller sans bouger, les yeux fermés et ensuite je me rendors.
Ou plutôt non. Elle est là, à côté de moi, si chaude, si douce. Cette jambe qui caresse mon mollet... Pisser d’abord, ou sauter sur elle ?
C’est vrai que, en cherchant bien, on n’est jamais non plus le seul fautif. Il suffit de regarder autour de soi et les raisons de nos actes se distinguent nettement dans la réponse que l’on est obligé de faire à ceux des autres… Enfin, je crois.
« Lève-toi Jacques. Tu vas être à la bourre ».
***
Je mets encore un moment à réaliser puis je regarde le réveil.
Putain ! Il est huit heures ! Je suis à la bourre.
Haletant encore de rage, les yeux encore à moitié fermés je me redresse tout en maugréant.
Mais pourquoi ai-je autant de colère en moi ?
Merde, je suis dans un sale état. J’ai la bouche pâteuse, les yeux collés comme si j’avais pleuré, et toujours cette colère immense qui couve en moi. Une envie irraisonnée de frapper quelqu’un. Frapper pour faire mal.
J’ai fais un rêve. Un sale rêve. Qu’est-ce que c’était, déjà ? Un cri résonne encore à mes oreilles.
Je ne me souviens plus des détails mais cela concernait Titia, je crois.
« Aller, Jacques. Debout, feignasse ! Les autres vont t’attendre ».
Je me tourne vers ma femme. Elle me regarde avec un joli sourire. Ses yeux verts sont encore emplis de sommeil.
Elle est si belle, même au réveil. Surtout au réveil ! Dans ses vieux tee-shirt, si délavés qu’ils en sont transparents, elle contraste tellement avec la Laetitia apprêtée que l’on peut voir plus tard dans la journée, au bureau ou ailleurs, qu’elle n’en n’est que plus sexy. Afficher ainsi ce côté négligée à mes côtés est la meilleure chose qu’elle puisse m’offrir en guise de bonjour.
D’une main que je sais experte, elle vérifie négligemment en-dessous de la couette que j’ai bien l’érection matinale quotidienne. Et avec un haussement de sourcil entendu elle se retourne pour se rendormir.
La vache ! Elle est cruelle. Vivement ce soir.
Je dépose un baiser sur son épaule que son tee-shirt trop grand a laissé à moitié nue.
« Ne réveille pas Paul, s’il-te-plait », me lance-t-elle d’une voix à nouveau imbibée de sommeil.
Pourquoi suis-je à tel point en colère contre elle ?
Je me lève. Je vais dans la cuisine pour allumer la cafetière et je me dirige vers les toilettes. Je passe devant la porte entrouverte de la chambre. Je vois vaguement le corps de Titia et la courbe de sa hanche sous la couette. Elle est tellement sexy.
Je pisse alors durant cinq bonnes minutes en luttant contre mon envie de retarder encore un peu mon départ pour rejoindre Titia dans le lit.
J’ai eu si froid, cette nuit.
Puis l’odeur irrésistible du café m’attire à nouveau dans la cuisine. Là, je m’installe quelques instants à la petite table en bois face à la fenêtre qui donne sur le jardin et j’en sirote une tasse brulante.
***
« Aussi vrai que je me nomme Bracasse, il faut qu’on parle », avait dit la créature.
Ce matin j’étais décidé à en parler.
Le vent soufflait dans les arbres qui bordent le coté sud du terrain de basket alors que je tentais un de mes célèbres paniers à trois points.
J’aime ces quelques arbres. Ils forment un rang de spectateurs qui, bien que muets, donnent leurs avis pour chacun de nos actes. Les arbres auraient tant à dire s’ils parlaient.
Evidemment la célébrité de mon jeu ne va pas au-delà de ces quelques chênes et de mes deux compagnons. Mais j’en éprouve tout de même une certaine fierté.
Le panier était raté. Pas de ˝Hourra !˝ cette fois-ci. Je n’étais pas assez concentré, peut-être.
Chaque semaine, Hervé, Stephan et moi-même nous disputons sans concession les faveurs d’un ballon orange que nous avons fini par nommer Bill.
S’il se trouvait quelqu’un d’assez tordu pour venir se balader de ce côté-ci de la ville le dimanche matin il pourrait entendre des ˝Passe moi Bill !˝, ˝Allez, rentre Bill !˝, ˝Et un de plus pour Bill !˝ ou plus souvent des ˝Et MERDE Bill !˝.
Notre terrain longe le parking d’un vieux Franprix dont les poubelles débordent constamment. C’en est au point que nous sommes obligés de balayer les ordures qui jonchent la surface de jeu avant chaque séance. Ce n’est pas vraiment le décor idéal pour une promenade matinale.
Sans les arbres, d’ailleurs, je suppose que nous n’aurions pas choisi cet endroit, nous non plus.
Je récupérais Bill et exécutais quelques dribbles en trottant, histoire de m’échauffer encore un peu.
Je me souviens que Steph avait une fois posé une question à Hervé concernant nos séances hebdomadaires : « Le Basket est-il pour nous une passion, un défoulement ou juste un jeu entre pote ? ».
Il arborait son air innocent et enfantin. Il n’était pas sérieux, c’était juste pour le taquiner. Hervé était psy et, en général, c’était lui qui tenait ce genre de propos.
J’avais donc répondu à sa place que je soupçonnais Bill de pencher plutôt pour la réponse B, le défoulement, et que cela ne lui plaisait guère d’être secoué de cette manière brutale… Nous avions ri pendant tout le reste du match.
Psychologue n’est pas un métier facile, pourrait dire Hervé. Mais face à des potes tels que Stephan et moi, ce boulot comporte alors quelques inconvénients majeurs.
Depuis longtemps nous sommes persuadés qu’Hervé a surement dressé en douce notre profil psychologique, certainement très proche de la vérité d’ailleurs. Mais il ne nous en a jamais fait part.
Heureusement peut-être.
Steph est le roi du râteau. Un affamé de jeunes femmes qui ne supporte pas l’idée de finir une soirée seul. Un célibataire endurci de trente sept ans qui écume toujours les boites de nuit à la recherche d’une nouvelle victime afin qu’elle lui fasse ce qu’il en a marre de faire tout seul.
Tandis que moi, Jacques, je suis le boy-scout, beau gosse de service, sportif endiablé que les filles ont toujours convoité et père d’un magnifique petit garçon de trois ans. Laetitia, ma femme, a l’exclusivité de mes attentions depuis notre rencontre. Sauf une fois…
J’étais si fier de cette fidélité à toute épreuve. Comment expliquer ma faute alors ?
Nous devions être un sacré filon pour un psy un tantinet investigateur.
C’est surement de cela dont j’avais besoin, d’un psy et d’un bon.
Il y a deux semaines à présent, Bracasse a nommé mes potes. A sa dernière visite il a parlé pour la première fois de personnes réelles, que je connaissais. Il m’a regardé, perché sur le toit de la vieille taverne sur lequel nous avions grimpé. Et de sa voix rauque et nasillarde, il me l’a dit.
***
Chaque gorgée de café remplit son devoir. Le liquide s’écoule le long de ma gorge et me réchauffe. Il ouvre mon appétit alors que son odeur me suggère celle d’un croissant chaud que je pourrais manger en sa compagnie.
Mais il est trop tard et je dois partir pour ne pas faire attendre mes amis.
Je rentre dans la salle de bain et regarde ma salle gueule dans le miroir. Merde… C’est quelque chose ! Tant pis les deux autres devront s’en contenter.
Je me passe un coup de gant, puis de brosse à dents, et j’enfile mon short.
En sortant, un léger mouvement attire mon attention. Je jette un ½il vers la porte de la chambre et j’aperçois vaguement Titia qui se recouche. Elle ne dort donc pas, la coquine ! Peut-être même espère-t-elle que je vienne lui rendre une petite visite !
« Je t’ai vu » lui dis-je en cherchant mes chaussures.
Elle me répond par un Rrrron pichhhh sonore qui me dérobe un sourire.
Je trouve enfin mes baskets usées parmi tout un amoncellement de chaussures aussi diverses les unes que les autres. En cuir, en toile, à talons. Bottes noires surélevées, petites tennis roses, minuscules Nike de Paul… Et tout cela en vrac dans le hall d’entrée.
Paul, mon bambin, mon brigand. Je t’aime.
Je souris. Je finis mes lacets et je passe devant la porte de la chambre de mon fils. J’ai un soudain frisson, une envie folle et inexplicable de le prendre dans mes bras. Mais on est dimanche et il ne se lèvera pas avant dix heures. Je prends sur moi et je descend au garage.
***
Les autres avaient du retard. Aussi mes pensées s’envolaient. Je les imaginais rejoindre mes soucis en une valse éreintante dans un bal gigantesque que donnerait ma mémoire.
Amusante métaphore qui me fit encore raté un panier. Putain, merde Bill !
Hervé serait le premier. Puis, quelque temps après, suivrait Steph, souriant et motivé pour jouer.
Steph est toujours le dernier. Toujours.
Hervé, lui, ne se permettait pas souvent le moindre retard. Je le connaissais depuis dix ans et la rigueur était une des qualités que l’on pouvait apprécier chez lui.
Je me rends compte à présent à quel point mes deux amis sont différents.
Hervé est petit. Il porte des lunettes. Il n’a presque plus de cheveux et il prend du ventre bien que nos rendez-vous hebdomadaire le maintiennent un tantinet en forme.
Steph est plutôt grand et musclé. Il n’est pas une de ces armoires à glace qui hantent les salles de sport mais il arbore une bonne stature dont il peut être fier à l’approche de la quarantaine. Cependant c’était toujours moi qui avais le plus de succès auprès des filles et j’ai bien remarqué que cela l’agaçait.
C’est intrigant de voir comme le destin se joue parfois de nous.
Je repris le ballon et entrepris de faire un tour complet du terrain en dribblant avant d’accélérer mon approche dans la zone des lancers-francs. Je fis un magnifique saut en extension qui se termina en un bras roulé complètement raté. N’ayant même pas atteint la planche de bois, Bill alla se promener du côté des poubelles.
Dès ma première année de Fac je rencontrais Stephan. Je compris dès le départ que c’était mon pouvoir de séduction qui l’émerveillait et l’intéressait puisqu’il y avait toujours une copine de ma copine pour satisfaire son insatiabilité. Puis l’amitié s’en est mêlée.
A présent il ferait tout pour moi. Enfin, je le croyais.
Je dû attendre la seconde année avant de faire la connaissance d’un étrange personnage nommé Hervé Lafleur. C’était la risée du campus avant de profiter de ma notoriété. Ensuite il recevait même quelques clins d’½il de certaines copines de mes copines.
Il était, déjà à l’époque, est et restera, probablement à jamais, un excellent psychologue. Depuis toujours il est doué pour déceler, d’un seul regard, le moindre travers, la moindre faille, la plus petite habitude ou manie de ses congénères. Selon lui, la plupart des gens sont d’une transparence éloquente.
Selon moi, les gens étaient soit sympas, soit inintéressant, soit cons. Stephan ajoutait quelques nuances, dépendantes du tour de poitrine de la personne concernée, mais Hervé nous apportait toujours ses lumières et compliquait bien des choses dans nos critères de valeur…
En repensant à certaine de ses mélopées philosophiques sur la psychologie de Steph, je fus pris d’un fou-rire.
Je ramassai Bill au milieu des détritus tout en riant. Il fallait absolument que je m’assois quelques instants car trois mômes passaient en fumant le long du terrain et je n’aurais pas voulu qu’ils me voient dans cet état. ˝Un vieux con qui se bidonne tout seul avec son ballon˝.
Et si en plus ils savaient que ce ballon s’appelait Bill…
Cette fois-ci, je me couchais presque. J’en pleurais.
Il y a deux semaines, lors de cette fameuse nuit, Bracasse avait eu des termes précis, sans équivoque.
« Non j’t’assure, Hervé est un pote, lui, sans aucun doute, avait-il dit entre deux de ses horribles reniflements. Steph aussi, mais bon… A la guerre comme à la guerre ! Tu le sais, non ? »
Visiblement quelque chose de gros le gênait, bloqué dans le fond de ses narines.
Une fois les mômes passés je repris le terrain d’assaut. J’étais déjà chaud pour un match impitoyable. Les autres allaient en baver.
***
Je rejoins le garage et son habituel capharnaüm afin de me mettre sérieusement à une recherche active des clés de la voiture. Je sais immédiatement que ce ne sera pas chose aisée dans un endroit où la moindre surface plane est encombrée par la plupart des objets inutiles et oubliés que tous les membres de la famille n’ont pas réussit à caser dans une des autres pièces de la maison.
Je retiens un cri de rage et de désespoir qui semble vouloir trouver une issu au fond de ma gorge et je remarque Bill dans l’angle opposé en compagnie du râteau, des bottes de jardinage et des toiles d’araignées. Dans ma hâte j’allais oublier le principal protagoniste de la matinée !
En passant je vérifie et je constate, sans surprise, que la voiture est ouverte. Maigre satisfaction car il me faudra tout de même les clés pour démarrer.
Je m’empare de Bill, pauvre vieux, qui s’éveille en sursaut alors que je le nettoie rapidement pour le jeter à l’arrière de la caisse. Bon, les saloperies de clés, maintenant !
En fait je les trouve assez rapidement, sur l’établi.
Je m’installe confortablement sur le siège du conducteur et démarre le moteur.
Pourquoi n’ai-je pas envie d’y aller ? Cela ne me ressemble pas de rechigner à ma séance sportive du dimanche.
Le goût du café encore à la bouche je me réveille à la voix endormie de Laetitia.
« Lève-toi Jacques. Tu vas être à la bourre ».
***
Hervé nous a beaucoup apporté. Steph ne dirait pas le contraire. Nous avons grandement profité de chaque conseil, chaque idée, chaque avis qu’Hervé se faisait un plaisir de nous donner sans compter.
Il nous éclairait en toutes circonstances, en toutes situations.
Un jour, Steph a décidé de quitter la fac. Les études n’étaient pas pour lui. Hervé était plutôt d’accord.
Stephan Rochet est devenu pompier.
De même, la fac ne m’a pas beaucoup avancé non plus. Je n’ai pas eu la réussite escomptée. J’ai laissé tomber pour me tourner vers une carrière commerciale. Mon physique avantageux, mon aisance naturelle et les quelques conseils épars d’Hervé faisaient de moi un vendeur hors pairs.
Dès ma seconde boite, Bouygues Télécom, j’ai rencontré Laetitia Pessiot. Après un an de parades amoureuses, je mis fin à une lutte acharnée pour obtenir son c½ur : elle devint ma femme, Laetitia Leroy. Evidemment j’appris alors, comme c’est souvent le cas, que son c½ur m’appartenait dès le premier regard. J’enrage mais je l’aime plus encore de m’avoir tant fait attendre.
Titia est une brunette aux yeux verts. Elle est de petite taille et ses jambes, le plus souvent rehaussées par de ravissantes chaussures à talons, font fantasmer tous les hommes de l’entreprise où nous travaillons encore aujourd’hui.
Faut dire qu’elle sait se mettre en valeur, ou plutôt qu’elle sait ce qui va plaire à son entourage masculin. Petites jupe tailleur, décolleté discret et pourtant provoquant, parfum léger et enivrant. Je vois chaque jour les regards des collègues se poser sur elle, la chercher des yeux dans les couloirs, humer son odeur à chacun de ses passages, chasser le moindre moment de solitude avec elle, la moindre chance d’obtenir son intérêt ne serait-ce qu’un instant… Bosser avec Titia est ma torture quotidienne depuis six ans.
La Panda d’Hervé se garait à côté de ma voiture. Je savais que les habitudes avaient la vie dure et je l’espérais de tout c½ur car je devais parler à Hervé avant l’arrivée de Steph.
C’était aussi à Hervé que j’avais raconté ma seule folle aventure, la seule erreur de parcours que j’ai faite. Ma seule trahison envers Titia.
***
Je me lève, la bouche pâteuse…
«Ne fais pas trop de bruit, s’il-te-plait. Je n’ai pas trop envie que Paul se lève tout de suite.
- Promis. Je vais être un vrai ninja…
- Mmm. C’est ça, tu es un vrai ninja ».
A poil, mon short en main, je vais à la cuisine et branche la cafetière. Je vais aux toilettes, me vide la vessie et regarde à nouveau la silhouette endormie de Titia avant d’entrer dans la salle de bain.
La porte à peine entrouverte, j’entends à nouveau mon cri. Il explose violemment dans toute ma tête !
Ce n’était pas Titia, ce soir-là, le soir de la silhouette. Ce n’était pas Titia, la jeune femme à mes côtés.
***
Paul est né il y a trois ans. C’est lors de la cuite titanesque qui suivi le jour de sa naissance que j’ai tout avoué à Hervé. Je savais qu’avec lui le secret serait bien gardé.
Encore tout ému d’avoir prit dans mes mains ce petit être fripé qui hurlait à en perdre son souffle, j’ai ressenti un immense désespoir en réalisant la responsabilité qui était mienne à présent : ce petit bonhomme était mon fils. J’ai aussitôt éprouvé le besoin de voir mes potes.
Et mes meilleurs amis ne m’ont pas laissé seul dans cette terrible épreuve. Nous avons donc tous bu comme des trous.
C’est dans cet état propice à toute discussion sérieuse qu’Hervé et moi nous sommes isolés de l’habituelle bande d’invités qui venaient me soutenir dans mon désarroi de nouveau papa.
A la lueur de la lune d’un soir d’été, dans les effluves d’alcool dont nous n’étions pas avares, je racontais à Hervé comment j’avais séduit une jeune fille quelques mois à peine après mon mariage. Elle était tout juste assez âgée pour pouvoir se permettre de passer le permis de conduire.
Elle s’appelait Samantha et était le type même d’adolescente à faire se retourner tous les hommes sur le trottoir. Je l’avais rencontré au hasard d’un de mes déplacements en clientèle sur Paris. Elle m’avait lancé un regard sulfureux auxquelles je n’ai pas pu résister. Sans un mot je me suis approché et je l’ai embrassée. Sans un mot elle a répondu à mon baiser.
Nous avons passé la nuit ensemble et nous nous sommes quittés le lendemain dans un silence quasi-irréel. Ce fut un moment de bonheur intense et brutal que je n’avais jamais pu oublier mais dont il me fallait taire l’existence.
***
« Ainsi tu as fait de tes rêves une sorte de terrain de jeu, c’est ça ?
- A peu près, oui ».
Je m’élançais et je marquais le panier sans aucun autre effort qu’une légère tension de ma jambe gauche. Hervé récupéra le ballon et s’écarta du couloir des lancers-francs pour pouvoir attaquer à son tour.
Il était déjà tout essoufflé. A son arrivée il avait voulu faire quelques tours de terrain en courant afin de s’échauffer. Je riais sous cape en devinant qu’il serait à moitié mort ensuite.
« Mais c’est plus que ça, Hervé, continuais-je. Depuis mon histoire avec Samantha, mes rêves ne sont plus les mêmes. Ils sont plus clairs, plus réels. Je suis vraiment dedans, tu sais. Comme au cinéma, mais je suis un des acteurs… ».
Hervé continuait de dribbler tout en cherchant une ouverture dans ma défense. Mais je le sentais soucieux. Je savais qu’il n’avait pas apprécié mon aventure extraconjugale, et rien que l’évocation du prénom de Samantha le rendait maussade.
« Et bien je trouve cela plutôt bénéfique ». Haleta-t-il en s’élançant vers moi d’un mouvement brusque que je stoppais en un écran imperméable. Il rebroussa chemin en gardant Bill.
« Oui, comprends bien, Jacquot, le rêve lucide, car c’est bien de cela qu’on parle, est une formidable occasion de faire face à ses problèmes pour une personne avertie. Tu as fait une connerie et ton subconscient te le rappelle à sa manière. Visiblement cela t’a choqué d’une manière ou d’une autre.
- Eh, Hervé ! J’ai lu des bouquins, tu sais. Ce que je veux, c’est ton avis personnel ».
Hervé fronça les sourcils tout en évitant bien de ne pas perdre le ballon en se déconcentrant.
« Que veux-tu que je te dise ? Tu fais des rêves où tu es conscient de rêver. Ces rêves sont clairs et limpides. Tout y est plus net que tu as l’impression que c’est réel. Et bien oui, Jacques, tu es un rêveur lucide. La plupart des gens oublie leurs rêves dès le réveil. C’est ce qui les estompe, ce qui leur donne cet aspect trouble et irréel. C’est un mauvais tour de Dame Mémoire. Toi, c’est comme si tu y étais. Tu t’en souviens car tu y étais ! ».
Il tira et marqua à trois points. Hourra ! Merde, Bill !
« Mais il y a autre chose, Hervé. Il y a ce Bracasse ».
***
Je sors de la salle de bain après m’être passé un coup de gant rapide. Je frissonne encore. Ce cri avait été si réel.
Putain ! Huit heure vingt. J’ai été long. Il faut que je me grouille où les autres vont attendre.
Tant pis pour le café, je pars sans.
Je jette un ½il à la porte de Paul. J’ai envie de l’embrasser comme si je n’allais jamais le revoir. J’ai envie de le prendre dans mes bras. De serrer son petit corps si léger, si tendre. De le chatouiller et de l’entendre rire en me criant Pitié ! Arrête papa !
Mais je ne le fais pas et m’empare des clés la voiture qui sont, comme d’habitude sur le living parmi les emballages vides de chewing gum et les vieux trombones rouillés.
Je descends les escaliers du garage et…
« Jacques, merde ! Lève-toi. Tu vas être carrément en retard ».
***
Bracasse est apparu il y a environ six mois. Je rêvais d’un supermarché où les gens se servaient sans compter dans les rayons et passaient les caisses de force, sans payer. Les caissières avaient d’ailleurs toutes quitté leur poste, sauf une qui se faisait un plaisir fou à exhiber son opulente poitrine.
« Jacques…
- Ok, bon, je continue ».
Les vigils avaient des fusils à pompe. Ils tiraient à vue sur les clients vandales. Je m’efforçais de sauver la vie à une ravissante jeune femme dont le caddie était aussi bien remplie que ne devait être nulle sa motivation à régler la note. Je me suis donc fait un devoir d’éradiquer les vigils à coup de boules. Je ne suis pas avare de prouesses guerrières dans mes rêves tant je me sens invulnérable. De plus, j’envisageai sérieusement de terminer celui-ci dans les bras de la cliente émerveillée par ma bravoure.
Mais, alors que tout se passait selon mes plus belles prédictions, une détonation plus forte que les autres retentit. La jeune femme tomba sur le sol, le dos en bouillie. Un vigil immense venait d’apparaître. Il mesurait au moins trois mètres et l’arme qu’il avait en main devait peser plus que moi. Il me tenait dans sa ligne de mire avec un rictus de satisfaction évidente.
J’allais me réveiller, il le fallait.
Son faciès changea brusquement. Les traits de son visage, sujet à la panique générale, se carapataient en tout sens. La terreur s’emparait de lui. Il lâcha son arme. Ses jambes ne semblaient plus vouloir le porter. Une tache sombre humidifia son pantalon. Il regardait un point situé derrière moi.
Le géant prit la tangente. D’un sursaut je me retournais pour faire face au sujet d’une telle épouvante.
La petite créature était là, prêt des caisses curieusement désertées. Un être sale, malodorant, vêtue d’une cape en haillons verdâtre dont la capuche camouflait un visage que je ne voulais pas voir. Seuls le bas de son menton et ses petits pieds crottés et griffus étaient visibles sous sa loque.
La créature poussa un rot, se racla la gorge et cracha sur le sol du magasin.
Je n’avais pas peur. Je ressentais plutôt un vague dégoût. Je fus de nouveau épris du désir de me réveiller.
« Dommage pour la femme ! Sûr que t’allais te la faire un peu plus loin, sur le parking ».
C’est en effet ce que j’avais prévu de faire. Mais cela m’irrita de l’entendre de cette impensable voix nasillarde, encombrée de glaires, reniflant à chaque syllabe. Chaque mot semblait sortir avec le soulagement qu’apporte une bienheureuse évasion d’un endroit méphitique.
« Qu’est-ce que tu dis ? Qui es-tu ? » Criai-je.
« Voyons, Jacques, lança la chose en même temps qu’un pet sonore, nous savons bien tout deux que Titia n’a pas le monopole de tes faveurs de ce côté-ci comme de l’autre de ton lit… ».
Je voulais m’élancer vers lui et le mettre en pièce mais je sentis aussitôt l’éveil s’emparer de moi.
***
« Je n’ai eu que le temps d’entendre sa dernière phrase avant de me retrouver dans mon lit : Aussi vrai que je me nomme Bracasse, il faut qu’on parle.
- Putain de rêve ! T’es vraiment sonné, Jacques. Tu devrais prendre rendez-vous avec ma secrétaire.
- Hervé, s’il-te-plait, c’est sérieux. J’ai pas fini et Steph ne va plus tarder ».
Non, je n’avais pas terminé et la colère sourde qui dormait en moi voulait jaillir avec la force d’un rhinocéros en charge.
« Depuis, je rencontre ce Bracasse en rêve plusieurs fois par semaine. C’est toujours dans des lieux insolites, dans des situations plus ou moins incongrues. Il me tire souvent de situations complexes et dangereuses.
- Ben on dirait que tu t’es fait un nouveau pote. J’espère que tu ne remets pas en question mon statut de meilleur ami, tout de même ».
Je n’avais plus envie de rire. La Laguna verte de Steph venait de faire son entrée sur le parking. Je m’approchai d’Hervé un peu trop brusquement.
« Ça fait deux semaines que je n’ai pas vu Bracasse.
- Il te manque, Jacques ?
- La dernière fois, nous étions sur le toit d’une taverne, ou une auberge qui s’appelait… Je ne sais plus… Le Dernier Soupir, je crois. On entendait distinctement les rires, les chants et les bavardages provenant de la salle bondée, en dessous de nous…
- Merde, Jacques, c’est dimanche pour moi aussi, tu sais. Joue au basket, d’accord.
- HERVÉ ! ». J’ai crié et lancé Bill à terre avec une telle violence que mon ami recula d’un bon mètre. Au loin je voyais Steph refermer sa voiture.
« Sur ce putain de toit, Bracasse m’a dit que Steph couche avec Titia ».
Je vis alors la stupéfaction se dessiner sur le visage d’Hervé.
***
Je suis à nouveau dans mon lit et Titia se retourne nonchalamment de son côté. Il est huit heure cinq et elle a rempli son rôle : je suis réveillé.
J’entends encore mon cri. C’est effrayant ! J’ai besoin de me rassurer.
« Je t’aime, chérie.
- Mmh… Moi… ssi ».
Je ne le suis pas tellement, finalement. Je me lève persuadé d’avoir déjà vécu ce moment. La sensation de déjà-vu est nette, mais se perd assez rapidement. Je suis pressé.
Je me dirige vers la cuisine. J’ai quand même envie d’un bon café.
Puis la salle de bain… Une douche rapide. Et, avec un dernier regard vers la porte fermée de la chambre de Paul, je descends l’escalier du garage.
J’ai la rage ! Une colère insensée dont je n’arrive pas à cerner la cause. Je prends Bill au passage et le lance à l’arrière de la voiture. Je crois que cela a un rapport avec Steph et… Titia ! Je ne sais pas.
Je ne sais plus.
Je sors la voiture du garage et j’avance le long de l’allée pour rejoindre la route. Le temps est maussade. Il ne faudrait pas qu’il pleuve.
Arrivé à l’angle de ma rue, je lance un dernier regard dans le rétroviseur. Je vois une Laguna verte se garer à hauteur de ma maison.
Alors tout me revient.
***
Nous faisions toujours les mêmes équipes : Hervé avec Steph contre moi. Et, comme toujours, je gagnais.
Ils ne faisaient pas le poids, je suis résolument plus physique qu’eux. Paul lui-même le faisait remarquer à chaque fois qu’ils venaient à la maison.
Ma révélation avait fait l’effet de la foudre sur Hervé. Il avait voulu répliquer, j’avais vu son expression ébahie, effarée, mais Steph faisait déjà son show d’ouverture sur le terrain : « Alors, les filles ! On s’met en jambes en attendant les vrais joueurs ? ».
Pourtant un petit quelque chose dans le regard d’Hervé m’avait glacé les veines. Durant tout le match, cette sensation resta comme une épée de Damoclès au-dessus de ma tête. Et je compris soudainement : Hervé savait. Bracasse avait dit la vérité et Hervé était au courant
J’étais le seul à ne pas le savoir. Steph se tape Titia et tout le monde se gausse de mon remarquable sens de l’observation.
Je sentis une incroyable fureur monter en moi.
Je marquai un nouveau panier laissant mes adversaires pliés en deux, essayant de reprendre leur souffle.
« Ô, bordel ! s’exclama Steph. Je suis lessivé. J’arrête…
- Peut-être t’es-tu un peu trop dépensé, ce matin, Steph, lui lançai-je d’une voix à peine reconnaissable.
- Pardon ?
- Pourquoi étais-tu en retard au juste ? Pourquoi es-tu toujours en retard ? Que fais-tu à chaque fois, pendant que l’on t’attend ?
- Arrête Jacques ! » S’interpose Hervé alors que je serrais les poings à m’en blanchir les phalanges.
« Il faut qu’on parle, Jacques. Tu dois me parler, à moi, pas à Steph ! D’accord ! A moi.
- Parler de quoi ? Expliquez-vous, les gars, de quoi voulez-vous parler ? ».
Je n’écoutais plus ni l’un ni l’autre. Seule la voix grinçante de Bracasse résonnait à mes oreilles tandis que je serrais les poings de plus en plus forts : « Stephan sort en douce avec Titia depuis des années maintenant. Il se la fait dès qu’une occasion se présente. Et autant te dire qu’elle rechigne moins avec lui qu’avec toi ! »
« J’aime Titia, Hervé ! Je l’aime plus que tout.
- Quoi ! S’exclame Steph.
- Je l’aime, et cet enfoiré se saute ma femme ! »
Steph resta coi, la bouche ouverte. Hervé avait fermé les yeux d’un air totalement abattu.
« J’ai vu ta voiture se garer. Je t’ai vu, Steph. Depuis combien de temps me fais-tu cela ! »
Il restait immobile, silencieux, debout devant moi, la bouche toujours ouverte. Hervé se mit entre nous deux et me regarda avec vigilance mais aussi avec une expression indéfinissable.
« Jacques ! Titia n’est plus ta femme. Tu le sais bien, non. A présent, elle est l’épouse de Stephan. Tu dois l’accepter ».
Je poussai violemment Hervé, d’un coup bref et rapide. Il tomba à terre et son crane heurta le sol. J’entendis le terrible cri à l’intérieur de ma tête alors que je me lançai sur Steph à toute allure.
***
La féminité de sa posture. La froideur de son apparence. L’intensité de son silence.
La silhouette sombre se penche vers moi et je hurle alors qu’elle me prend la main. Un hurlement atroce, un cri dont je ne me serais jamais cru capable.
Son regard me transperce, sonde la plus petite parcelle de moi-même. Rien ne lui échappe. Elle sait tout de moi : ce que je suis, ce que je serais, ce que j’aurai pu être et ce que je pourrais devenir.
Lorsque j’ouvre les yeux, le corps frémissant de transpiration glacée, j’entends encore mon cri. La petite chambre qui s’étend devant moi n’est pas celle que je partage avec Titia. Je reconnais le petit velux et je n’ai pas besoin de vérifier que la jeune femme à mes côté n’est pas ma superbe Laetitia mais bel et bien Samantha, la nymphette au corps de rêve.
La silhouette est venue et son départ laisse en moi un vide insoutenable. Elle a jugé mon acte et m’a déclaré coupable. J’ai rêvé une vie qui ne devrait pas être. J’ai rêvé ma vie.
Il me faut la vivre maintenant.
Bracasse
04-05-2007 (jour de mon anniversaire...)
Je suis un tantinet à la bourre et, je dois l'avouer, j'ai un peu dépassé le cadre des quatre pages.
C'est ma première nouvelle et j'espère que vous saurez être indulgents.
Ce récit fait partie d'un cycle, d'une saga que j'ai en tête depuis des années et que je compte écrire un jour si le temps me laisse le loisir de le faire.
Le Rêve y tient le rôle principal et donc j'ai pensé que cette histoire convenait tout à fait au thème de ce concours. Cependant il m'a fallut faire un gros travail d'adaptation afin d'en faire une nouvelle qui se suffit en elle-même. Malgré tout il resterait quelques explications à donner et quleques éclaircissement du fait de son retrait de tout un contexte qui est plutôt fourni...
Tant pis. J'aime tellement certains de ces personnages (Bracasse, la silhouette, Hervé...) que je ne pouvais pas les en retirer.
Allez, à votre jugement et peut-être à bientôt !
Réveille-toi, Bébé, c'est l'heure.
C'est souvent de nos meilleurs amis que viennent nos pires ennuis... - Bernard Werber (Les Thanatonautes)
Je croyais m’être réveillé en sursaut. Je n’y voyais pas grand-chose car seul un petit velux offrait quelque lumière dans la petite chambre.
Elle était là en face de moi. Une ombre parmi les ombres, mais plus sombre que toutes les ténèbres environnantes.
Elle s’est approchée de moi sans bruit, terrorisant même le silence sur son passage.
J’aurais voulu hurler, réveiller la jeune femme à mes côtés, mais j’étais incapable de tout mouvement et aucun son ne voulait sortir se confronter à cette effrayante silhouette.
Tout en elle était froid. Si froid que de la vapeur sortait de ma bouche au rythme de mon souffle qui s’accélérait.
L’ombre a glissé jusqu’au pied du lit. Son regard sans yeux s’est infiltré en moi l’instant d’une éternité.
La féminité de sa posture. La froideur de son apparence. L’intensité de son silence.
Puis elle s’est penchée sur moi et a agrippé ma main.
Alors, j’ai hurlé.
***
« Jacques ! C’est l’heure… »
Je pense qu’il est consciemment difficile de porter un jugement objectif sur soi-même. Comment se soulager d’une faute que l’on sait très bien avoir commise ? Comment supporter l’idée d’en être le seul coupable ? Paradoxalement, je suis certain que ce jugement se fait, à notre insu avec la plus grande rigueur. Mais est-ce bien le moment d’en débattre, Jacquot ?
Je n’ai jamais apprécié cette couleur verte qui tapisse les murs de ma chambre.
« Bébé ! Réveille-toi, c’est l’heure ».
Selon Titia, le vert aurait quelque vertu apaisante.
Je ne m’en sens pas plus calme pour autant. Moi, je préfère le blanc.
La nausée.
Je crois que j’ai une de ces envies de dégobiller ! J’ai aussi très mal au crâne. En même temps, j’ai une de ces gaules ! C’est la cuisse de Titia contre ma jambe, là !
« Jacques ! Debout ».
C’est dur d’ouvrir les yeux alors qu’on n’en a absolument aucune envie. Pourquoi le ferai-je ?
J’ai envie de pisser.
Je n’ai qu’à y aller sans bouger, les yeux fermés et ensuite je me rendors.
Ou plutôt non. Elle est là, à côté de moi, si chaude, si douce. Cette jambe qui caresse mon mollet... Pisser d’abord, ou sauter sur elle ?
C’est vrai que, en cherchant bien, on n’est jamais non plus le seul fautif. Il suffit de regarder autour de soi et les raisons de nos actes se distinguent nettement dans la réponse que l’on est obligé de faire à ceux des autres… Enfin, je crois.
« Lève-toi Jacques. Tu vas être à la bourre ».
***
Je mets encore un moment à réaliser puis je regarde le réveil.
Putain ! Il est huit heures ! Je suis à la bourre.
Haletant encore de rage, les yeux encore à moitié fermés je me redresse tout en maugréant.
Mais pourquoi ai-je autant de colère en moi ?
Merde, je suis dans un sale état. J’ai la bouche pâteuse, les yeux collés comme si j’avais pleuré, et toujours cette colère immense qui couve en moi. Une envie irraisonnée de frapper quelqu’un. Frapper pour faire mal.
J’ai fais un rêve. Un sale rêve. Qu’est-ce que c’était, déjà ? Un cri résonne encore à mes oreilles.
Je ne me souviens plus des détails mais cela concernait Titia, je crois.
« Aller, Jacques. Debout, feignasse ! Les autres vont t’attendre ».
Je me tourne vers ma femme. Elle me regarde avec un joli sourire. Ses yeux verts sont encore emplis de sommeil.
Elle est si belle, même au réveil. Surtout au réveil ! Dans ses vieux tee-shirt, si délavés qu’ils en sont transparents, elle contraste tellement avec la Laetitia apprêtée que l’on peut voir plus tard dans la journée, au bureau ou ailleurs, qu’elle n’en n’est que plus sexy. Afficher ainsi ce côté négligée à mes côtés est la meilleure chose qu’elle puisse m’offrir en guise de bonjour.
D’une main que je sais experte, elle vérifie négligemment en-dessous de la couette que j’ai bien l’érection matinale quotidienne. Et avec un haussement de sourcil entendu elle se retourne pour se rendormir.
La vache ! Elle est cruelle. Vivement ce soir.
Je dépose un baiser sur son épaule que son tee-shirt trop grand a laissé à moitié nue.
« Ne réveille pas Paul, s’il-te-plait », me lance-t-elle d’une voix à nouveau imbibée de sommeil.
Pourquoi suis-je à tel point en colère contre elle ?
Je me lève. Je vais dans la cuisine pour allumer la cafetière et je me dirige vers les toilettes. Je passe devant la porte entrouverte de la chambre. Je vois vaguement le corps de Titia et la courbe de sa hanche sous la couette. Elle est tellement sexy.
Je pisse alors durant cinq bonnes minutes en luttant contre mon envie de retarder encore un peu mon départ pour rejoindre Titia dans le lit.
J’ai eu si froid, cette nuit.
Puis l’odeur irrésistible du café m’attire à nouveau dans la cuisine. Là, je m’installe quelques instants à la petite table en bois face à la fenêtre qui donne sur le jardin et j’en sirote une tasse brulante.
***
« Aussi vrai que je me nomme Bracasse, il faut qu’on parle », avait dit la créature.
Ce matin j’étais décidé à en parler.
Le vent soufflait dans les arbres qui bordent le coté sud du terrain de basket alors que je tentais un de mes célèbres paniers à trois points.
J’aime ces quelques arbres. Ils forment un rang de spectateurs qui, bien que muets, donnent leurs avis pour chacun de nos actes. Les arbres auraient tant à dire s’ils parlaient.
Evidemment la célébrité de mon jeu ne va pas au-delà de ces quelques chênes et de mes deux compagnons. Mais j’en éprouve tout de même une certaine fierté.
Le panier était raté. Pas de ˝Hourra !˝ cette fois-ci. Je n’étais pas assez concentré, peut-être.
Chaque semaine, Hervé, Stephan et moi-même nous disputons sans concession les faveurs d’un ballon orange que nous avons fini par nommer Bill.
S’il se trouvait quelqu’un d’assez tordu pour venir se balader de ce côté-ci de la ville le dimanche matin il pourrait entendre des ˝Passe moi Bill !˝, ˝Allez, rentre Bill !˝, ˝Et un de plus pour Bill !˝ ou plus souvent des ˝Et MERDE Bill !˝.
Notre terrain longe le parking d’un vieux Franprix dont les poubelles débordent constamment. C’en est au point que nous sommes obligés de balayer les ordures qui jonchent la surface de jeu avant chaque séance. Ce n’est pas vraiment le décor idéal pour une promenade matinale.
Sans les arbres, d’ailleurs, je suppose que nous n’aurions pas choisi cet endroit, nous non plus.
Je récupérais Bill et exécutais quelques dribbles en trottant, histoire de m’échauffer encore un peu.
Je me souviens que Steph avait une fois posé une question à Hervé concernant nos séances hebdomadaires : « Le Basket est-il pour nous une passion, un défoulement ou juste un jeu entre pote ? ».
Il arborait son air innocent et enfantin. Il n’était pas sérieux, c’était juste pour le taquiner. Hervé était psy et, en général, c’était lui qui tenait ce genre de propos.
J’avais donc répondu à sa place que je soupçonnais Bill de pencher plutôt pour la réponse B, le défoulement, et que cela ne lui plaisait guère d’être secoué de cette manière brutale… Nous avions ri pendant tout le reste du match.
Psychologue n’est pas un métier facile, pourrait dire Hervé. Mais face à des potes tels que Stephan et moi, ce boulot comporte alors quelques inconvénients majeurs.
Depuis longtemps nous sommes persuadés qu’Hervé a surement dressé en douce notre profil psychologique, certainement très proche de la vérité d’ailleurs. Mais il ne nous en a jamais fait part.
Heureusement peut-être.
Steph est le roi du râteau. Un affamé de jeunes femmes qui ne supporte pas l’idée de finir une soirée seul. Un célibataire endurci de trente sept ans qui écume toujours les boites de nuit à la recherche d’une nouvelle victime afin qu’elle lui fasse ce qu’il en a marre de faire tout seul.
Tandis que moi, Jacques, je suis le boy-scout, beau gosse de service, sportif endiablé que les filles ont toujours convoité et père d’un magnifique petit garçon de trois ans. Laetitia, ma femme, a l’exclusivité de mes attentions depuis notre rencontre. Sauf une fois…
J’étais si fier de cette fidélité à toute épreuve. Comment expliquer ma faute alors ?
Nous devions être un sacré filon pour un psy un tantinet investigateur.
C’est surement de cela dont j’avais besoin, d’un psy et d’un bon.
Il y a deux semaines à présent, Bracasse a nommé mes potes. A sa dernière visite il a parlé pour la première fois de personnes réelles, que je connaissais. Il m’a regardé, perché sur le toit de la vieille taverne sur lequel nous avions grimpé. Et de sa voix rauque et nasillarde, il me l’a dit.
***
Chaque gorgée de café remplit son devoir. Le liquide s’écoule le long de ma gorge et me réchauffe. Il ouvre mon appétit alors que son odeur me suggère celle d’un croissant chaud que je pourrais manger en sa compagnie.
Mais il est trop tard et je dois partir pour ne pas faire attendre mes amis.
Je rentre dans la salle de bain et regarde ma salle gueule dans le miroir. Merde… C’est quelque chose ! Tant pis les deux autres devront s’en contenter.
Je me passe un coup de gant, puis de brosse à dents, et j’enfile mon short.
En sortant, un léger mouvement attire mon attention. Je jette un ½il vers la porte de la chambre et j’aperçois vaguement Titia qui se recouche. Elle ne dort donc pas, la coquine ! Peut-être même espère-t-elle que je vienne lui rendre une petite visite !
« Je t’ai vu » lui dis-je en cherchant mes chaussures.
Elle me répond par un Rrrron pichhhh sonore qui me dérobe un sourire.
Je trouve enfin mes baskets usées parmi tout un amoncellement de chaussures aussi diverses les unes que les autres. En cuir, en toile, à talons. Bottes noires surélevées, petites tennis roses, minuscules Nike de Paul… Et tout cela en vrac dans le hall d’entrée.
Paul, mon bambin, mon brigand. Je t’aime.
Je souris. Je finis mes lacets et je passe devant la porte de la chambre de mon fils. J’ai un soudain frisson, une envie folle et inexplicable de le prendre dans mes bras. Mais on est dimanche et il ne se lèvera pas avant dix heures. Je prends sur moi et je descend au garage.
***
Les autres avaient du retard. Aussi mes pensées s’envolaient. Je les imaginais rejoindre mes soucis en une valse éreintante dans un bal gigantesque que donnerait ma mémoire.
Amusante métaphore qui me fit encore raté un panier. Putain, merde Bill !
Hervé serait le premier. Puis, quelque temps après, suivrait Steph, souriant et motivé pour jouer.
Steph est toujours le dernier. Toujours.
Hervé, lui, ne se permettait pas souvent le moindre retard. Je le connaissais depuis dix ans et la rigueur était une des qualités que l’on pouvait apprécier chez lui.
Je me rends compte à présent à quel point mes deux amis sont différents.
Hervé est petit. Il porte des lunettes. Il n’a presque plus de cheveux et il prend du ventre bien que nos rendez-vous hebdomadaire le maintiennent un tantinet en forme.
Steph est plutôt grand et musclé. Il n’est pas une de ces armoires à glace qui hantent les salles de sport mais il arbore une bonne stature dont il peut être fier à l’approche de la quarantaine. Cependant c’était toujours moi qui avais le plus de succès auprès des filles et j’ai bien remarqué que cela l’agaçait.
C’est intrigant de voir comme le destin se joue parfois de nous.
Je repris le ballon et entrepris de faire un tour complet du terrain en dribblant avant d’accélérer mon approche dans la zone des lancers-francs. Je fis un magnifique saut en extension qui se termina en un bras roulé complètement raté. N’ayant même pas atteint la planche de bois, Bill alla se promener du côté des poubelles.
Dès ma première année de Fac je rencontrais Stephan. Je compris dès le départ que c’était mon pouvoir de séduction qui l’émerveillait et l’intéressait puisqu’il y avait toujours une copine de ma copine pour satisfaire son insatiabilité. Puis l’amitié s’en est mêlée.
A présent il ferait tout pour moi. Enfin, je le croyais.
Je dû attendre la seconde année avant de faire la connaissance d’un étrange personnage nommé Hervé Lafleur. C’était la risée du campus avant de profiter de ma notoriété. Ensuite il recevait même quelques clins d’½il de certaines copines de mes copines.
Il était, déjà à l’époque, est et restera, probablement à jamais, un excellent psychologue. Depuis toujours il est doué pour déceler, d’un seul regard, le moindre travers, la moindre faille, la plus petite habitude ou manie de ses congénères. Selon lui, la plupart des gens sont d’une transparence éloquente.
Selon moi, les gens étaient soit sympas, soit inintéressant, soit cons. Stephan ajoutait quelques nuances, dépendantes du tour de poitrine de la personne concernée, mais Hervé nous apportait toujours ses lumières et compliquait bien des choses dans nos critères de valeur…
En repensant à certaine de ses mélopées philosophiques sur la psychologie de Steph, je fus pris d’un fou-rire.
Je ramassai Bill au milieu des détritus tout en riant. Il fallait absolument que je m’assois quelques instants car trois mômes passaient en fumant le long du terrain et je n’aurais pas voulu qu’ils me voient dans cet état. ˝Un vieux con qui se bidonne tout seul avec son ballon˝.
Et si en plus ils savaient que ce ballon s’appelait Bill…
Cette fois-ci, je me couchais presque. J’en pleurais.
Il y a deux semaines, lors de cette fameuse nuit, Bracasse avait eu des termes précis, sans équivoque.
« Non j’t’assure, Hervé est un pote, lui, sans aucun doute, avait-il dit entre deux de ses horribles reniflements. Steph aussi, mais bon… A la guerre comme à la guerre ! Tu le sais, non ? »
Visiblement quelque chose de gros le gênait, bloqué dans le fond de ses narines.
Une fois les mômes passés je repris le terrain d’assaut. J’étais déjà chaud pour un match impitoyable. Les autres allaient en baver.
***
Je rejoins le garage et son habituel capharnaüm afin de me mettre sérieusement à une recherche active des clés de la voiture. Je sais immédiatement que ce ne sera pas chose aisée dans un endroit où la moindre surface plane est encombrée par la plupart des objets inutiles et oubliés que tous les membres de la famille n’ont pas réussit à caser dans une des autres pièces de la maison.
Je retiens un cri de rage et de désespoir qui semble vouloir trouver une issu au fond de ma gorge et je remarque Bill dans l’angle opposé en compagnie du râteau, des bottes de jardinage et des toiles d’araignées. Dans ma hâte j’allais oublier le principal protagoniste de la matinée !
En passant je vérifie et je constate, sans surprise, que la voiture est ouverte. Maigre satisfaction car il me faudra tout de même les clés pour démarrer.
Je m’empare de Bill, pauvre vieux, qui s’éveille en sursaut alors que je le nettoie rapidement pour le jeter à l’arrière de la caisse. Bon, les saloperies de clés, maintenant !
En fait je les trouve assez rapidement, sur l’établi.
Je m’installe confortablement sur le siège du conducteur et démarre le moteur.
Pourquoi n’ai-je pas envie d’y aller ? Cela ne me ressemble pas de rechigner à ma séance sportive du dimanche.
Le goût du café encore à la bouche je me réveille à la voix endormie de Laetitia.
« Lève-toi Jacques. Tu vas être à la bourre ».
***
Hervé nous a beaucoup apporté. Steph ne dirait pas le contraire. Nous avons grandement profité de chaque conseil, chaque idée, chaque avis qu’Hervé se faisait un plaisir de nous donner sans compter.
Il nous éclairait en toutes circonstances, en toutes situations.
Un jour, Steph a décidé de quitter la fac. Les études n’étaient pas pour lui. Hervé était plutôt d’accord.
Stephan Rochet est devenu pompier.
De même, la fac ne m’a pas beaucoup avancé non plus. Je n’ai pas eu la réussite escomptée. J’ai laissé tomber pour me tourner vers une carrière commerciale. Mon physique avantageux, mon aisance naturelle et les quelques conseils épars d’Hervé faisaient de moi un vendeur hors pairs.
Dès ma seconde boite, Bouygues Télécom, j’ai rencontré Laetitia Pessiot. Après un an de parades amoureuses, je mis fin à une lutte acharnée pour obtenir son c½ur : elle devint ma femme, Laetitia Leroy. Evidemment j’appris alors, comme c’est souvent le cas, que son c½ur m’appartenait dès le premier regard. J’enrage mais je l’aime plus encore de m’avoir tant fait attendre.
Titia est une brunette aux yeux verts. Elle est de petite taille et ses jambes, le plus souvent rehaussées par de ravissantes chaussures à talons, font fantasmer tous les hommes de l’entreprise où nous travaillons encore aujourd’hui.
Faut dire qu’elle sait se mettre en valeur, ou plutôt qu’elle sait ce qui va plaire à son entourage masculin. Petites jupe tailleur, décolleté discret et pourtant provoquant, parfum léger et enivrant. Je vois chaque jour les regards des collègues se poser sur elle, la chercher des yeux dans les couloirs, humer son odeur à chacun de ses passages, chasser le moindre moment de solitude avec elle, la moindre chance d’obtenir son intérêt ne serait-ce qu’un instant… Bosser avec Titia est ma torture quotidienne depuis six ans.
La Panda d’Hervé se garait à côté de ma voiture. Je savais que les habitudes avaient la vie dure et je l’espérais de tout c½ur car je devais parler à Hervé avant l’arrivée de Steph.
C’était aussi à Hervé que j’avais raconté ma seule folle aventure, la seule erreur de parcours que j’ai faite. Ma seule trahison envers Titia.
***
Je me lève, la bouche pâteuse…
«Ne fais pas trop de bruit, s’il-te-plait. Je n’ai pas trop envie que Paul se lève tout de suite.
- Promis. Je vais être un vrai ninja…
- Mmm. C’est ça, tu es un vrai ninja ».
A poil, mon short en main, je vais à la cuisine et branche la cafetière. Je vais aux toilettes, me vide la vessie et regarde à nouveau la silhouette endormie de Titia avant d’entrer dans la salle de bain.
La porte à peine entrouverte, j’entends à nouveau mon cri. Il explose violemment dans toute ma tête !
Ce n’était pas Titia, ce soir-là, le soir de la silhouette. Ce n’était pas Titia, la jeune femme à mes côtés.
***
Paul est né il y a trois ans. C’est lors de la cuite titanesque qui suivi le jour de sa naissance que j’ai tout avoué à Hervé. Je savais qu’avec lui le secret serait bien gardé.
Encore tout ému d’avoir prit dans mes mains ce petit être fripé qui hurlait à en perdre son souffle, j’ai ressenti un immense désespoir en réalisant la responsabilité qui était mienne à présent : ce petit bonhomme était mon fils. J’ai aussitôt éprouvé le besoin de voir mes potes.
Et mes meilleurs amis ne m’ont pas laissé seul dans cette terrible épreuve. Nous avons donc tous bu comme des trous.
C’est dans cet état propice à toute discussion sérieuse qu’Hervé et moi nous sommes isolés de l’habituelle bande d’invités qui venaient me soutenir dans mon désarroi de nouveau papa.
A la lueur de la lune d’un soir d’été, dans les effluves d’alcool dont nous n’étions pas avares, je racontais à Hervé comment j’avais séduit une jeune fille quelques mois à peine après mon mariage. Elle était tout juste assez âgée pour pouvoir se permettre de passer le permis de conduire.
Elle s’appelait Samantha et était le type même d’adolescente à faire se retourner tous les hommes sur le trottoir. Je l’avais rencontré au hasard d’un de mes déplacements en clientèle sur Paris. Elle m’avait lancé un regard sulfureux auxquelles je n’ai pas pu résister. Sans un mot je me suis approché et je l’ai embrassée. Sans un mot elle a répondu à mon baiser.
Nous avons passé la nuit ensemble et nous nous sommes quittés le lendemain dans un silence quasi-irréel. Ce fut un moment de bonheur intense et brutal que je n’avais jamais pu oublier mais dont il me fallait taire l’existence.
***
« Ainsi tu as fait de tes rêves une sorte de terrain de jeu, c’est ça ?
- A peu près, oui ».
Je m’élançais et je marquais le panier sans aucun autre effort qu’une légère tension de ma jambe gauche. Hervé récupéra le ballon et s’écarta du couloir des lancers-francs pour pouvoir attaquer à son tour.
Il était déjà tout essoufflé. A son arrivée il avait voulu faire quelques tours de terrain en courant afin de s’échauffer. Je riais sous cape en devinant qu’il serait à moitié mort ensuite.
« Mais c’est plus que ça, Hervé, continuais-je. Depuis mon histoire avec Samantha, mes rêves ne sont plus les mêmes. Ils sont plus clairs, plus réels. Je suis vraiment dedans, tu sais. Comme au cinéma, mais je suis un des acteurs… ».
Hervé continuait de dribbler tout en cherchant une ouverture dans ma défense. Mais je le sentais soucieux. Je savais qu’il n’avait pas apprécié mon aventure extraconjugale, et rien que l’évocation du prénom de Samantha le rendait maussade.
« Et bien je trouve cela plutôt bénéfique ». Haleta-t-il en s’élançant vers moi d’un mouvement brusque que je stoppais en un écran imperméable. Il rebroussa chemin en gardant Bill.
« Oui, comprends bien, Jacquot, le rêve lucide, car c’est bien de cela qu’on parle, est une formidable occasion de faire face à ses problèmes pour une personne avertie. Tu as fait une connerie et ton subconscient te le rappelle à sa manière. Visiblement cela t’a choqué d’une manière ou d’une autre.
- Eh, Hervé ! J’ai lu des bouquins, tu sais. Ce que je veux, c’est ton avis personnel ».
Hervé fronça les sourcils tout en évitant bien de ne pas perdre le ballon en se déconcentrant.
« Que veux-tu que je te dise ? Tu fais des rêves où tu es conscient de rêver. Ces rêves sont clairs et limpides. Tout y est plus net que tu as l’impression que c’est réel. Et bien oui, Jacques, tu es un rêveur lucide. La plupart des gens oublie leurs rêves dès le réveil. C’est ce qui les estompe, ce qui leur donne cet aspect trouble et irréel. C’est un mauvais tour de Dame Mémoire. Toi, c’est comme si tu y étais. Tu t’en souviens car tu y étais ! ».
Il tira et marqua à trois points. Hourra ! Merde, Bill !
« Mais il y a autre chose, Hervé. Il y a ce Bracasse ».
***
Je sors de la salle de bain après m’être passé un coup de gant rapide. Je frissonne encore. Ce cri avait été si réel.
Putain ! Huit heure vingt. J’ai été long. Il faut que je me grouille où les autres vont attendre.
Tant pis pour le café, je pars sans.
Je jette un ½il à la porte de Paul. J’ai envie de l’embrasser comme si je n’allais jamais le revoir. J’ai envie de le prendre dans mes bras. De serrer son petit corps si léger, si tendre. De le chatouiller et de l’entendre rire en me criant Pitié ! Arrête papa !
Mais je ne le fais pas et m’empare des clés la voiture qui sont, comme d’habitude sur le living parmi les emballages vides de chewing gum et les vieux trombones rouillés.
Je descends les escaliers du garage et…
« Jacques, merde ! Lève-toi. Tu vas être carrément en retard ».
***
Bracasse est apparu il y a environ six mois. Je rêvais d’un supermarché où les gens se servaient sans compter dans les rayons et passaient les caisses de force, sans payer. Les caissières avaient d’ailleurs toutes quitté leur poste, sauf une qui se faisait un plaisir fou à exhiber son opulente poitrine.
« Jacques…
- Ok, bon, je continue ».
Les vigils avaient des fusils à pompe. Ils tiraient à vue sur les clients vandales. Je m’efforçais de sauver la vie à une ravissante jeune femme dont le caddie était aussi bien remplie que ne devait être nulle sa motivation à régler la note. Je me suis donc fait un devoir d’éradiquer les vigils à coup de boules. Je ne suis pas avare de prouesses guerrières dans mes rêves tant je me sens invulnérable. De plus, j’envisageai sérieusement de terminer celui-ci dans les bras de la cliente émerveillée par ma bravoure.
Mais, alors que tout se passait selon mes plus belles prédictions, une détonation plus forte que les autres retentit. La jeune femme tomba sur le sol, le dos en bouillie. Un vigil immense venait d’apparaître. Il mesurait au moins trois mètres et l’arme qu’il avait en main devait peser plus que moi. Il me tenait dans sa ligne de mire avec un rictus de satisfaction évidente.
J’allais me réveiller, il le fallait.
Son faciès changea brusquement. Les traits de son visage, sujet à la panique générale, se carapataient en tout sens. La terreur s’emparait de lui. Il lâcha son arme. Ses jambes ne semblaient plus vouloir le porter. Une tache sombre humidifia son pantalon. Il regardait un point situé derrière moi.
Le géant prit la tangente. D’un sursaut je me retournais pour faire face au sujet d’une telle épouvante.
La petite créature était là, prêt des caisses curieusement désertées. Un être sale, malodorant, vêtue d’une cape en haillons verdâtre dont la capuche camouflait un visage que je ne voulais pas voir. Seuls le bas de son menton et ses petits pieds crottés et griffus étaient visibles sous sa loque.
La créature poussa un rot, se racla la gorge et cracha sur le sol du magasin.
Je n’avais pas peur. Je ressentais plutôt un vague dégoût. Je fus de nouveau épris du désir de me réveiller.
« Dommage pour la femme ! Sûr que t’allais te la faire un peu plus loin, sur le parking ».
C’est en effet ce que j’avais prévu de faire. Mais cela m’irrita de l’entendre de cette impensable voix nasillarde, encombrée de glaires, reniflant à chaque syllabe. Chaque mot semblait sortir avec le soulagement qu’apporte une bienheureuse évasion d’un endroit méphitique.
« Qu’est-ce que tu dis ? Qui es-tu ? » Criai-je.
« Voyons, Jacques, lança la chose en même temps qu’un pet sonore, nous savons bien tout deux que Titia n’a pas le monopole de tes faveurs de ce côté-ci comme de l’autre de ton lit… ».
Je voulais m’élancer vers lui et le mettre en pièce mais je sentis aussitôt l’éveil s’emparer de moi.
***
« Je n’ai eu que le temps d’entendre sa dernière phrase avant de me retrouver dans mon lit : Aussi vrai que je me nomme Bracasse, il faut qu’on parle.
- Putain de rêve ! T’es vraiment sonné, Jacques. Tu devrais prendre rendez-vous avec ma secrétaire.
- Hervé, s’il-te-plait, c’est sérieux. J’ai pas fini et Steph ne va plus tarder ».
Non, je n’avais pas terminé et la colère sourde qui dormait en moi voulait jaillir avec la force d’un rhinocéros en charge.
« Depuis, je rencontre ce Bracasse en rêve plusieurs fois par semaine. C’est toujours dans des lieux insolites, dans des situations plus ou moins incongrues. Il me tire souvent de situations complexes et dangereuses.
- Ben on dirait que tu t’es fait un nouveau pote. J’espère que tu ne remets pas en question mon statut de meilleur ami, tout de même ».
Je n’avais plus envie de rire. La Laguna verte de Steph venait de faire son entrée sur le parking. Je m’approchai d’Hervé un peu trop brusquement.
« Ça fait deux semaines que je n’ai pas vu Bracasse.
- Il te manque, Jacques ?
- La dernière fois, nous étions sur le toit d’une taverne, ou une auberge qui s’appelait… Je ne sais plus… Le Dernier Soupir, je crois. On entendait distinctement les rires, les chants et les bavardages provenant de la salle bondée, en dessous de nous…
- Merde, Jacques, c’est dimanche pour moi aussi, tu sais. Joue au basket, d’accord.
- HERVÉ ! ». J’ai crié et lancé Bill à terre avec une telle violence que mon ami recula d’un bon mètre. Au loin je voyais Steph refermer sa voiture.
« Sur ce putain de toit, Bracasse m’a dit que Steph couche avec Titia ».
Je vis alors la stupéfaction se dessiner sur le visage d’Hervé.
***
Je suis à nouveau dans mon lit et Titia se retourne nonchalamment de son côté. Il est huit heure cinq et elle a rempli son rôle : je suis réveillé.
J’entends encore mon cri. C’est effrayant ! J’ai besoin de me rassurer.
« Je t’aime, chérie.
- Mmh… Moi… ssi ».
Je ne le suis pas tellement, finalement. Je me lève persuadé d’avoir déjà vécu ce moment. La sensation de déjà-vu est nette, mais se perd assez rapidement. Je suis pressé.
Je me dirige vers la cuisine. J’ai quand même envie d’un bon café.
Puis la salle de bain… Une douche rapide. Et, avec un dernier regard vers la porte fermée de la chambre de Paul, je descends l’escalier du garage.
J’ai la rage ! Une colère insensée dont je n’arrive pas à cerner la cause. Je prends Bill au passage et le lance à l’arrière de la voiture. Je crois que cela a un rapport avec Steph et… Titia ! Je ne sais pas.
Je ne sais plus.
Je sors la voiture du garage et j’avance le long de l’allée pour rejoindre la route. Le temps est maussade. Il ne faudrait pas qu’il pleuve.
Arrivé à l’angle de ma rue, je lance un dernier regard dans le rétroviseur. Je vois une Laguna verte se garer à hauteur de ma maison.
Alors tout me revient.
***
Nous faisions toujours les mêmes équipes : Hervé avec Steph contre moi. Et, comme toujours, je gagnais.
Ils ne faisaient pas le poids, je suis résolument plus physique qu’eux. Paul lui-même le faisait remarquer à chaque fois qu’ils venaient à la maison.
Ma révélation avait fait l’effet de la foudre sur Hervé. Il avait voulu répliquer, j’avais vu son expression ébahie, effarée, mais Steph faisait déjà son show d’ouverture sur le terrain : « Alors, les filles ! On s’met en jambes en attendant les vrais joueurs ? ».
Pourtant un petit quelque chose dans le regard d’Hervé m’avait glacé les veines. Durant tout le match, cette sensation resta comme une épée de Damoclès au-dessus de ma tête. Et je compris soudainement : Hervé savait. Bracasse avait dit la vérité et Hervé était au courant
J’étais le seul à ne pas le savoir. Steph se tape Titia et tout le monde se gausse de mon remarquable sens de l’observation.
Je sentis une incroyable fureur monter en moi.
Je marquai un nouveau panier laissant mes adversaires pliés en deux, essayant de reprendre leur souffle.
« Ô, bordel ! s’exclama Steph. Je suis lessivé. J’arrête…
- Peut-être t’es-tu un peu trop dépensé, ce matin, Steph, lui lançai-je d’une voix à peine reconnaissable.
- Pardon ?
- Pourquoi étais-tu en retard au juste ? Pourquoi es-tu toujours en retard ? Que fais-tu à chaque fois, pendant que l’on t’attend ?
- Arrête Jacques ! » S’interpose Hervé alors que je serrais les poings à m’en blanchir les phalanges.
« Il faut qu’on parle, Jacques. Tu dois me parler, à moi, pas à Steph ! D’accord ! A moi.
- Parler de quoi ? Expliquez-vous, les gars, de quoi voulez-vous parler ? ».
Je n’écoutais plus ni l’un ni l’autre. Seule la voix grinçante de Bracasse résonnait à mes oreilles tandis que je serrais les poings de plus en plus forts : « Stephan sort en douce avec Titia depuis des années maintenant. Il se la fait dès qu’une occasion se présente. Et autant te dire qu’elle rechigne moins avec lui qu’avec toi ! »
« J’aime Titia, Hervé ! Je l’aime plus que tout.
- Quoi ! S’exclame Steph.
- Je l’aime, et cet enfoiré se saute ma femme ! »
Steph resta coi, la bouche ouverte. Hervé avait fermé les yeux d’un air totalement abattu.
« J’ai vu ta voiture se garer. Je t’ai vu, Steph. Depuis combien de temps me fais-tu cela ! »
Il restait immobile, silencieux, debout devant moi, la bouche toujours ouverte. Hervé se mit entre nous deux et me regarda avec vigilance mais aussi avec une expression indéfinissable.
« Jacques ! Titia n’est plus ta femme. Tu le sais bien, non. A présent, elle est l’épouse de Stephan. Tu dois l’accepter ».
Je poussai violemment Hervé, d’un coup bref et rapide. Il tomba à terre et son crane heurta le sol. J’entendis le terrible cri à l’intérieur de ma tête alors que je me lançai sur Steph à toute allure.
***
La féminité de sa posture. La froideur de son apparence. L’intensité de son silence.
La silhouette sombre se penche vers moi et je hurle alors qu’elle me prend la main. Un hurlement atroce, un cri dont je ne me serais jamais cru capable.
Son regard me transperce, sonde la plus petite parcelle de moi-même. Rien ne lui échappe. Elle sait tout de moi : ce que je suis, ce que je serais, ce que j’aurai pu être et ce que je pourrais devenir.
Lorsque j’ouvre les yeux, le corps frémissant de transpiration glacée, j’entends encore mon cri. La petite chambre qui s’étend devant moi n’est pas celle que je partage avec Titia. Je reconnais le petit velux et je n’ai pas besoin de vérifier que la jeune femme à mes côté n’est pas ma superbe Laetitia mais bel et bien Samantha, la nymphette au corps de rêve.
La silhouette est venue et son départ laisse en moi un vide insoutenable. Elle a jugé mon acte et m’a déclaré coupable. J’ai rêvé une vie qui ne devrait pas être. J’ai rêvé ma vie.
Il me faut la vivre maintenant.
Bracasse
04-05-2007 (jour de mon anniversaire...)
Un rêve non interprété est comme une lettre non lue.
Il est de bon esprit de récompenser l'oeuvre la plus méritante, aussi adresse-je mon vote à celle, qui non content de me sembler la plus belle, s'annonce par ses mots propres comme étant la seule susceptible de mériter le trophée de la victoire.
Le rêve continue.
Le rêve continue.
La fidelité par l'amour,
La valeur par l'honneur,
Le parjure par la mort.
La valeur par l'honneur,
Le parjure par la mort.
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- Nymphe des bois
- Messages : 96
- Enregistré le : sam. mars 10, 2007 11:17 am
- Localisation : Toulouse
- Contact :
bah avec un plebiscite pareil je vois pas comment ça ne pourrait pas l'être.
tu as un assez bon texte dans le ton du concours et quoi qu'il en soit des amitiés qui ne saurait te désavouer.
je ne vais pas quand même aller propagander partout ou je passe de venir voir ici. On croirait que je cherche à me promouvoir comme certain le font avec certain jeux.
tu as un assez bon texte dans le ton du concours et quoi qu'il en soit des amitiés qui ne saurait te désavouer.
je ne vais pas quand même aller propagander partout ou je passe de venir voir ici. On croirait que je cherche à me promouvoir comme certain le font avec certain jeux.
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- Administratrice
- Messages : 1283
- Enregistré le : lun. août 08, 2005 12:41 pm
- Localisation : Marseille
Juste une idée comme ça...
Et si les personnes qui votent disaient pour qui elles ont voté non ?
Je dis ça parce que visiblement ça en gêne plus d'un cette histoire de concours...
Et puis même c'est toujours intéressant d'avoir des avis sur les nouvelles écrites. Donc vous pouvez même donner votre avis sur une nouvelle pour laquelle vous n'avez pas voté !
Enfin c'est juste une idée...
Et si les personnes qui votent disaient pour qui elles ont voté non ?
Je dis ça parce que visiblement ça en gêne plus d'un cette histoire de concours...
Et puis même c'est toujours intéressant d'avoir des avis sur les nouvelles écrites. Donc vous pouvez même donner votre avis sur une nouvelle pour laquelle vous n'avez pas voté !
Enfin c'est juste une idée...