Témoignage qui tente d'être explicatif
Posté : jeu. août 23, 2007 10:30 am
Face aux réactions que je vois régulièrement sur ce forum et suite à un certain nombre de demandes, je crois qu'il n'est pas inutile que je "copie/colle" un texte que j'ai écrit sur un autre forum, en tombant sur un topic parlant de "Dieu et la Raison", le plus intéressant qu'il m'ait été donné de lire depuis un bon moment. Ce message est donc un témoignage qui évoque mon rapport à la religion et à Dieu, ce que j'entends par là et ce que ça implique. J'espère que ça aidera certains à avoir une vision moins schématique et "pré-mâchée". Pour une lecture totalement compréhensible (notamment au niveau de "dieu en tant que concept"), il faudrait lire les 10 pages qui précèdent mon intervention dans ce topic, donc je préfère laisser tel quel et répondre aux questions à la suite.
Je suis issu d'une famille "catholique" absolument pas croyante pour un sou. J'ai été baptisé pour faire plaisir à mémé, mais plongé dès mon plus jeune âge dans un athéisme farouche (inutile de faire la liste des arguments, ils ont été énumérés par certains dans ces pages). Cela dit, en grandissant un peu, j'ai été fasciné de constater que toutes les cultures célébraient une forme de divinité, aux quatre coins du globe et à toutes les époques.
Placé dans un lycée catholique, uniquement pour la qualité de l'enseignement et pas pour la "religion", j'ai persisté dans mon athéisme en tournant en dérision tout ce qui touchait à "Dieu". Quelques faits notables ont commencé à ébranler un peu mes convictions :
- un séjour aux Etats Unis, dans une famille très croyante, qui allait à la messe tous les dimanches. J'y ai découvert un aspect de la religion que je ne comprenais pas : le terme même de religion. Dans cette grande salle, une fois par semaine, tous les membres de la famille devaient se réunir, se relier. Mais aussi se relier aux autres membres de la communauté. Ne maitrisant pas vraiment la langue religieuse anglaise (surtout avec le fort accent du cureton du coin), je passais le plus clair de mon temps à regarder les autres. Même sans comprendre, je sentais qu'il y avait quelque chose là dedans de particulier.
- en première, nous devions choisir parmi plusieurs "modules" de religion. L'un d'eux m'avait attiré, car donné par l'une des profs considérée comme les plus intéressantes de l'établissement, sur le thème du "Mal dans l'art". Là, c'est à l'aspect culturel de la religion que nous nous sommes attaqués. Et pour une fois, le message de certains textes était décrypté de manière intéressante.
- pour finir sur le lycée, un prof de philo de terminale avait beaucoup insisté sur le fait que la science, expliquant le comment, ne marchait absolument pas sur les plates-bandes de la religion qui s'intéressait plus au "pourquoi".
J'en suis sorti "au pire" agnostique, mais surement pas convaincu. Ce qui m'a convaincu, ça a été les deux années suivantes, en médecine. Je veux bien admettre que les complexifications physiques puissent tenir du jeu de l'esprit, tout comme la recherche du nombre d'or dans la suite de Fibonacci, les galaxies et les coquilles vides. Mais l'observation des fonctionnements du vivant sont bien plus impressionnant encore. L'étude d'une simple cellule révèle des mécanismes infiniment plus complexes et perfectionnés que nos schémas les plus avancés. Je ne parle même pas de la finalité de ces cellules (être les vecteurs de la vie), mais simplement des mécanismes de contrôles, rétro-contrôles, collaboration, destruction, création, mis en place. Une simple cellule est sensible à la chaleur, à la température, à la pression, aux variations ultra-fines de concentration de tel ou tel ions, disposent de tout un tas de messagers chimiques, se détruisent quand elles deviennent obsolètes en produisant des signaux de mort afin d'attirer des cellules pour les phagocyter et les recycler entièrement... (sans même rentrer dans les détails de ces mécanismes, qui sont encore plus ahurissants).
Nous ne savons pas faire l'équivalent. Je me souviens surtout du ton humble que prenaient les professeurs de biologie moléculaire, expliquant quelles astuces ils tentaient de mettre en place pour tripoter deux trois éléments dans une cellule, pour "copier" la vie, mais sans pouvoir la créer. Quand bien même on y arriverait, on n'aurait seulement réussi à imiter la nature.
En bref, la moindre de nos cellules surpasse de très loin tout ce que nous sommes capables de faire. Et que le hasard soit capable d'une telle perfection, même en plusieurs milliards d'années d'évolution sélective, est assez difficile à imaginer. D'un pure point de vue probabiliste, l'existence d'un principe premier ayant "créé" la vie est moins improbable.
Après deux années dans ce domaine, j'avoue avoir été convaincu qu'il y avait "quelque chose". Mais qu'en faire ?
Car "si Dieu existe", reste à savoir ce que c'est d'une part, ce que ça change d'autre part.
La théorie du petit bonhomme sur son nuage n'a jamais vraiment trouvé d'écho dans mon esprit... Je ne crois pas en un "dieu" qui régisse le monde, ou qui décide des choses à ma place. En admettant qu'il soit omnipotent et ubiquitaire, je ne vois pas pourquoi il se pencherait sur la vie de chacune de ses créatures. A vrai dire, je n'envisage pas même "dieu" comme étant particulièrement concerné par ce qui se passe sur Terre, pas plus que je ne place l'homme en être parfait. Biologiquement, la vie est "parfaite", car infiniment complexe, même chez la plus primitive des bactéries. A vrai dire, "en tant que tel", l'existence ou la non existence de "dieu" ne change rien.
C'est là qu'intervient la religion. Un certain courant de pensée tend à faire passer "la spiritualité" devant la religion, en disant qu'on peut croire en Dieu sans avoir besoin de structure. Peut être, mais je trouve alors que c'est tourner à vide, car croire ou ne pas croire en Dieu ne change finalement rien. Car même si on croit en Dieu, ça n'implique pas de croire en une vie après la mort, à la résurgence de l'âme, ou que sais-je encore. On peut très bien être aussi "seul face à soi même" avec que sans Dieu. Ce n'est même pas une réponse magique à toutes les questions, ni un appui inconditionnel dans les moments difficiles...
J'envisage de moins en moins la croyance en Dieu (comme concept, à la [nom d'un membre du forum]) sans structure, à vrai dire. Cette structure, c'est à la fois une culture, des valeurs, mais ça peut également passer par des cérémonies qui vont tendre à relier les différents croyants, vers un désir de transcendance commun.
Un mélange assez gênant a été opéré au cours de ces pages sur les croyants et les pratiquants, introduisant des paradoxes comme de possibles "agnostiques chrétiens". Une religion, ce n'est pas un texte à appliquer à la lettre, ni une série de simagrée à accomplir. Ce ne sont pas des paroles à suivre aveuglément. La religion catholique par exemple, se base sur des écrits, la Bible, dont le message "officiel" est adapté à l'époque par un représentant, le Pape, mais dont l'autorité peut être contestée et le message modifiée par n'importe quel curé, puis par n'importe quel croyant. Il y a un rituel, mais ne pas l'accomplir peut être un choix. Ne pas aller à la messe ne fait pas "un mauvais catholique". Je ne m'éloigne pas vraiment du sujet, car il y aurait quelque chose d'aliénant si ce rituel était effectivement impératif, et donc un rejet de la Raison. Un bon catholique / chrétien est un croyant qui doute, et qui par son doute va devoir réfléchir sur des messages "officiels" afin d'intégrer son interprétation à son mode de vie. Sans raison, la religion est une escroquerie, une aliénation.
Parmi les reproches que l'on fait souvent à la religion :
- de s'opposer à la science. Or je rejoins [deux membres de l'autre forum], plus la science apporte de réponses, plus elle semble improbable par un chaos.
- la religion est souvent rejetée à cause "de son histoire", "de ce qu'elle a engendré". La religion n'est jamais qu'un prétexte. Est ce bien une histoire de religion quand les Etats Unis attaquent l'Irak ? La liberté a aussi très souvent servi de prétexte pour des atrocités, doit-on la rejeter ?
Bon, je reconnais avoir beaucoup associé "Dieu" et "religion", mais encore une fois, c'est simplement parce que, à mon sens, enlever le concept de Dieu de toute structure le rend totalement inutile et dépourvu de sens.
Je suis issu d'une famille "catholique" absolument pas croyante pour un sou. J'ai été baptisé pour faire plaisir à mémé, mais plongé dès mon plus jeune âge dans un athéisme farouche (inutile de faire la liste des arguments, ils ont été énumérés par certains dans ces pages). Cela dit, en grandissant un peu, j'ai été fasciné de constater que toutes les cultures célébraient une forme de divinité, aux quatre coins du globe et à toutes les époques.
Placé dans un lycée catholique, uniquement pour la qualité de l'enseignement et pas pour la "religion", j'ai persisté dans mon athéisme en tournant en dérision tout ce qui touchait à "Dieu". Quelques faits notables ont commencé à ébranler un peu mes convictions :
- un séjour aux Etats Unis, dans une famille très croyante, qui allait à la messe tous les dimanches. J'y ai découvert un aspect de la religion que je ne comprenais pas : le terme même de religion. Dans cette grande salle, une fois par semaine, tous les membres de la famille devaient se réunir, se relier. Mais aussi se relier aux autres membres de la communauté. Ne maitrisant pas vraiment la langue religieuse anglaise (surtout avec le fort accent du cureton du coin), je passais le plus clair de mon temps à regarder les autres. Même sans comprendre, je sentais qu'il y avait quelque chose là dedans de particulier.
- en première, nous devions choisir parmi plusieurs "modules" de religion. L'un d'eux m'avait attiré, car donné par l'une des profs considérée comme les plus intéressantes de l'établissement, sur le thème du "Mal dans l'art". Là, c'est à l'aspect culturel de la religion que nous nous sommes attaqués. Et pour une fois, le message de certains textes était décrypté de manière intéressante.
- pour finir sur le lycée, un prof de philo de terminale avait beaucoup insisté sur le fait que la science, expliquant le comment, ne marchait absolument pas sur les plates-bandes de la religion qui s'intéressait plus au "pourquoi".
J'en suis sorti "au pire" agnostique, mais surement pas convaincu. Ce qui m'a convaincu, ça a été les deux années suivantes, en médecine. Je veux bien admettre que les complexifications physiques puissent tenir du jeu de l'esprit, tout comme la recherche du nombre d'or dans la suite de Fibonacci, les galaxies et les coquilles vides. Mais l'observation des fonctionnements du vivant sont bien plus impressionnant encore. L'étude d'une simple cellule révèle des mécanismes infiniment plus complexes et perfectionnés que nos schémas les plus avancés. Je ne parle même pas de la finalité de ces cellules (être les vecteurs de la vie), mais simplement des mécanismes de contrôles, rétro-contrôles, collaboration, destruction, création, mis en place. Une simple cellule est sensible à la chaleur, à la température, à la pression, aux variations ultra-fines de concentration de tel ou tel ions, disposent de tout un tas de messagers chimiques, se détruisent quand elles deviennent obsolètes en produisant des signaux de mort afin d'attirer des cellules pour les phagocyter et les recycler entièrement... (sans même rentrer dans les détails de ces mécanismes, qui sont encore plus ahurissants).
Nous ne savons pas faire l'équivalent. Je me souviens surtout du ton humble que prenaient les professeurs de biologie moléculaire, expliquant quelles astuces ils tentaient de mettre en place pour tripoter deux trois éléments dans une cellule, pour "copier" la vie, mais sans pouvoir la créer. Quand bien même on y arriverait, on n'aurait seulement réussi à imiter la nature.
En bref, la moindre de nos cellules surpasse de très loin tout ce que nous sommes capables de faire. Et que le hasard soit capable d'une telle perfection, même en plusieurs milliards d'années d'évolution sélective, est assez difficile à imaginer. D'un pure point de vue probabiliste, l'existence d'un principe premier ayant "créé" la vie est moins improbable.
Après deux années dans ce domaine, j'avoue avoir été convaincu qu'il y avait "quelque chose". Mais qu'en faire ?
Car "si Dieu existe", reste à savoir ce que c'est d'une part, ce que ça change d'autre part.
La théorie du petit bonhomme sur son nuage n'a jamais vraiment trouvé d'écho dans mon esprit... Je ne crois pas en un "dieu" qui régisse le monde, ou qui décide des choses à ma place. En admettant qu'il soit omnipotent et ubiquitaire, je ne vois pas pourquoi il se pencherait sur la vie de chacune de ses créatures. A vrai dire, je n'envisage pas même "dieu" comme étant particulièrement concerné par ce qui se passe sur Terre, pas plus que je ne place l'homme en être parfait. Biologiquement, la vie est "parfaite", car infiniment complexe, même chez la plus primitive des bactéries. A vrai dire, "en tant que tel", l'existence ou la non existence de "dieu" ne change rien.
C'est là qu'intervient la religion. Un certain courant de pensée tend à faire passer "la spiritualité" devant la religion, en disant qu'on peut croire en Dieu sans avoir besoin de structure. Peut être, mais je trouve alors que c'est tourner à vide, car croire ou ne pas croire en Dieu ne change finalement rien. Car même si on croit en Dieu, ça n'implique pas de croire en une vie après la mort, à la résurgence de l'âme, ou que sais-je encore. On peut très bien être aussi "seul face à soi même" avec que sans Dieu. Ce n'est même pas une réponse magique à toutes les questions, ni un appui inconditionnel dans les moments difficiles...
J'envisage de moins en moins la croyance en Dieu (comme concept, à la [nom d'un membre du forum]) sans structure, à vrai dire. Cette structure, c'est à la fois une culture, des valeurs, mais ça peut également passer par des cérémonies qui vont tendre à relier les différents croyants, vers un désir de transcendance commun.
Un mélange assez gênant a été opéré au cours de ces pages sur les croyants et les pratiquants, introduisant des paradoxes comme de possibles "agnostiques chrétiens". Une religion, ce n'est pas un texte à appliquer à la lettre, ni une série de simagrée à accomplir. Ce ne sont pas des paroles à suivre aveuglément. La religion catholique par exemple, se base sur des écrits, la Bible, dont le message "officiel" est adapté à l'époque par un représentant, le Pape, mais dont l'autorité peut être contestée et le message modifiée par n'importe quel curé, puis par n'importe quel croyant. Il y a un rituel, mais ne pas l'accomplir peut être un choix. Ne pas aller à la messe ne fait pas "un mauvais catholique". Je ne m'éloigne pas vraiment du sujet, car il y aurait quelque chose d'aliénant si ce rituel était effectivement impératif, et donc un rejet de la Raison. Un bon catholique / chrétien est un croyant qui doute, et qui par son doute va devoir réfléchir sur des messages "officiels" afin d'intégrer son interprétation à son mode de vie. Sans raison, la religion est une escroquerie, une aliénation.
Parmi les reproches que l'on fait souvent à la religion :
- de s'opposer à la science. Or je rejoins [deux membres de l'autre forum], plus la science apporte de réponses, plus elle semble improbable par un chaos.
- la religion est souvent rejetée à cause "de son histoire", "de ce qu'elle a engendré". La religion n'est jamais qu'un prétexte. Est ce bien une histoire de religion quand les Etats Unis attaquent l'Irak ? La liberté a aussi très souvent servi de prétexte pour des atrocités, doit-on la rejeter ?
Bon, je reconnais avoir beaucoup associé "Dieu" et "religion", mais encore une fois, c'est simplement parce que, à mon sens, enlever le concept de Dieu de toute structure le rend totalement inutile et dépourvu de sens.