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Une humanité entre rêves et cauchemars

Posté : dim. déc. 03, 2006 11:21 pm
par Juan-Matus
Un regard ponctuel sur l'humanité, comme un exercice panoramique...

... inspiré du chef-d'oeuvre de spiritualité de Chris Iwen (Le don du prophète).

Si l’on survolait la Terre, et si l’on pouvait embrasser la totalité de la vie humaine dans un seul regard, que verrait-on ? On verrait des hommes et des femmes qui pleurent et qui crient. On entendrait le soupir des plus sages, et le feulement des plus fous. On sentirait la détresse des enfants, et l’angoisse des faibles. Et on découvrirait, avec une certaine incrédulité, la marche des chars et la fureur des armes, la guerre de l’homme contre l’homme. Sur de petites échelles, et sur un terrain moins dense, des conflits qui succèdent aux actes de domination et de nuisance, quand il ne s’agit pas simplement de l’indifférence du nanti devant la misère du démuni. Et ailleurs, sur de grandes échelles, on exploite et on asservit.

Mais l’on entendrait aussi des éclats de rire, et des sourires qui se croisent, et des baisers qui s’échangent. On verrait des hommes et des femmes qui se cherchent, qui se cherchent eux-mêmes et qui se cherchent entre eux. Une humanité entière pétrie d’espoir, et qui sautille à gauche et à droite, pour attraper quelques feuilles évanescentes à l’arbre du bonheur. Et il est si haut, cet arbre, que beaucoup n’en voient même pas les feuilles. Ainsi serait la contradiction de l’humanité : du sang et du rire, et comme un humour macabre qui recouvrirait toute cette folie. La Terre est peuplée de gens pas vraiment heureux, et pas tout à fait malheureux. Quelque chose entre les deux. Mais il s’agit peut-être de l’ivresse de la souffrance, ou du choc traumatique d’un bonheur trop grand. Le bonheur d’exister, ou la souffrance de vivre une vie noyée dans l’obscurité cosmique, sans une lumière qui vienne éclairer le chemin ou apaiser le cœur.

Oui, il en est ainsi de l’existence humaine. Un mélange presque inextricable d’ombre et de lumière. Un mélange de rire hystérique et de plaisir névrotique. Mais aussi un mariage incertain entre la perfection et la vulnérabilité, entre la beauté la plus effrayante, et la laideur la plus réconfortante. Car la laideur peut rassurer et apaiser, quand elle raconte une histoire. L’histoire de la jeune humanité qui, faute de maturité, tombe encore et encore, afin d’apprendre à marcher. L’histoire de ces hommes et de ces femmes qui se marchent les uns sur les autres, et qui écrasent leurs propres ombres, et broient leurs propres os, car la souffrance détruit la raison, obscurcit la vie et cherche son chemin d’un homme à l’autre.

Mais entre les cendres et les cadavres, et entre le désespoir et les illusions fugaces de bonheur, il existe une possibilité de s’affranchir de la nuit, et de rejoindre une lumière qui ne fait pas d’ombre et qui ne brûle pas les yeux. Et le passage entre l’acide et la lave prend sa source dans le cœur. C’est un chemin intérieur, et c’est une flamme mince et timide qui parle doucement, et qui se tait à la moindre bourrasque du mental. Mais une flamme que rien ne peut éteindre, et dont les ombres et les projections font naître des sourires et des étreintes. Car c’est de l’amour dont il s’agit, et cet amour est loin d’être une abstraction pour philosophes. Il s’agit d’une énergie, aussi indéfinissable soit-elle.